COLD WAR de Pawel Pawlikowski : amour tourmenté pendant la Guerre Froide

Un peu austère dans sa première demi-heure, Cold War, nouveau film du réalisateur Pawel Pawlikowski (après le réussi « Ida »), finit par nous emporter grâce à une histoire d’amour maudite entre la Pologne et Paris.

Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, Wiktor (Tomasz Kot) parcourt les petits villages de Pologne à la recherche de chanteurs et de danseurs. Avec une amie, ils ambitionnent de monter une troupe faisant la part belle aux chants traditionnels et anciens. Le but : amener un peu de folklore dans les villes et divertir les gens. La misère sociale faisant rage, nombreuses sont les personnes à postuler aux auditions. Parmi elles, Zula (Joanna Kulig) qui par sa beauté et son caractère fait instantanément craquer Wiktor. Il l’engage et va peu à peu faire d’elle la star de son spectacle.

Le show se révèle être un succès surprise mais il va être récupéré de force pour devenir un éloge de Staline. En pleine guerre froide, Wiktor voit ses valeurs malmenées et sent sa liberté menacée. Il songe à fuir avec Zula avec laquelle il entretient une passion amoureuse. Mais cette dernière ne se sent pas tout à fait prête à tout lâcher et à se mettre en danger…

Si l’aspect historique et politique reste en arrière plan et fait office de barrage constant pour les personnages, ce qui semble avant tout intéresser le cinéaste est l’histoire d’amour entre Wiktor et Zula. Le premier veut rester libre et fidèle à ses convictions, la seconde tient simplement à sauver sa peau et être aimée sans condition. C’est peu dire que dans le rôle de Zula, l’actrice Joanna Kulig crève l’écran. Avec son noir et blanc stylisé et son atmosphère mélancolique, ce long-métrage convoque un certain nombre de chef d’oeuvres du cinéma des années 1950 avec brio. Il y a quelque chose de beau, d’amer et d’hypnotique.

Outre une romance très tourmentée qui prend au fil de l’intrigue les atours d’un amour impossible, Pawel Pawlikowski parle aussi de la difficulté d’aimer et de rester soi-même quand son identité est déchirée en raison d’une terre natale toxique qui vous impose de vous laisser conditionner sous peine de devenir un hors la loi.

Entre des numéros chantés et dansés folkloriques pleins de grâce et un Paris jazzy, Cold War sonde les névroses et l’impuissance d’un homme et d’une femme qui n’arrivent jamais à trouver leur porte de sortie pour être heureux en toute simplicité. Un film pointu, qui se mérite, mais dont la mise en scène et l’interprétation valent le détour.

Film sorti en salles le 24 octobre 2018