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Alexis Rocamora brille dans la pièce « Ce qu’il reste » de Julien Di Mascio

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Avec « Ce qu’il reste », le metteur en scène et comédien Julien Di Mascio (qui est un grand fan de théâtre russe, « ce théâtre sensible, bavard et quotidien » comme il le décrit affectueusement) signe sa première pièce de théâtre. Il y incarne le premier rôle, celui de Damien, un jeune comédien tourmenté et indécis.

Damien n’est pas un personnage franchement aimable : il est très centré sur lui-même, ressasse ses soucis et ses frustrations en boucle sans vraiment prêter attention à ceux qui l’entourent. Alors que tous ses castings débouchent sur des échecs, que toutes ses rencontres avec des garçons ne dépassent jamais le stade d’une nuit, il peut heureusement compter sur ses deux meilleurs amis. Anaïs (Athéna Dias), d’abord, qui est sa colocataire et dont la personnalité, contraire à celle de Damien, pourrait l’amener à un peu se bousculer et se remettre en question. Anaïs mène en effet une vie plus rangée, a un travail ordinaire dans lequel elle s’investit à fond. Elle est une jeune femme forte et déterminée. Il y aussi et surtout également aux côtés de Damien le doux et toujours réconfortant Thibault (Alexis Rocamora). Tous les mardis soir, Damien va chez lui pour regarder sur son canapé des films et des séries entre deux conversations à coeur ouvert. Thibault est au chômage, ne va pas forcément super bien mais il reste toujours positif et tourné vers les autres.

Tout bascule lors d’une de ces soirées où Thibault prête une fois de plus son épaule à Damien qui est venu chouiner. Il avoue à ce dernier qu’il est amoureux de lui. Damien ne sait pas comment prendre la nouvelle et envisage de prendre la fuite après en avoir parlé à Anaïs. Sauf qu’il se trouve qu’Anaïs est pour sa part amoureuse de Thibault, qui est bisexuel. Un triangle amoureux se profile, dont les retournements et conséquences vont s’étendre sur près de 15 ans.

alexis rocamora

Alexis Rocamora, la belle révélation de la pièce

La pièce est intimiste et personnelle, sensible, dans l’ère du temps. Cela se sent par moments que c’est une première création : Julien Di Mascio a une petite tendance à vouloir raconter trop de choses (le poids de la vie d’artiste, la solitude d’un jeune homosexuel citadin, les liens complexes à la famille) et le récit n’est pas toujours parfaitement tenu. Il y a du gras, notamment dans la dernière partie où Di Mascio se pose en auteur à succès tourmenté le temps d’une longue interview. On sent le désir du jeune metteur en scène de se livrer à fond, d’évoquer beaucoup de thématiques en même temps. Quitte à s’éparpiller un peu et dévier de ce qui nous intéresse surtout ici : un triangle amoureux qui se joue, entre drame et comédie, des codes du mélodrame.

Tous les meilleurs passages de « Ce qu’il reste » sont ceux où Julien Di Mascio s’oppose à Athéna Dias et Alexis Rocamora. La première livre une belle performance en embrassant un personnage de meilleure amie ambivalente et pas que puisqu’elle interprète avec brio plusieurs personnages différents au fil de l’intrigue. Le second est ni plus ni moins la révélation majeure du spectacle. Dès sa première apparition sur scène, Alexis Rocamora (qui s’est greffé au spectacle en cours de route) se distingue par son beau phrasé, son jeu toujours juste, sa faculté à rendre terriblement attachant et émouvant le personnage de Thibault. On voudrait qu’il soit de chaque scène car dès qu’il est là il illumine tout de sa présence et décuple les émotions quelles soient légères ou plus graves. Un talent évident chez ce jeune comédien qui parvient rapidement à nous faire tomber amoureux de son personnage. Ne serait-ce que pour lui, cela vaut le coup de se déplacer pour découvrir cette pièce aux allures d’oeuvre de jeunesse, tendre et sincère.

« Ce qu’il reste » se joue le mardi à 19h30 au Théâtre Montmartre Galabru à Paris jusqu’au 22 octobre 2019

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3