FICTIONS LGBT

BOBBY SEUL CONTRE TOUS de Russell Mulcahy : cette Bible qui nous sépare…

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Banlieue américaine, une famille catholique heureuse. Tout le monde n’a d’yeux que pour Bobby (Ryan Kelley), jeune adolescent volontaire, fierté de la famille, qui a toujours suivi le droit chemin. Mais voilà que depuis quelques temps Bobby cache un secret de plus en plus étouffant. Il sent qu’il est homosexuel. Il n’a aucune envie de l’être, sachant très bien ce que sa famille en pense suite à la lecture de certains passages de la Bible (fameux passages du Lévitique). Mais il ne peut plus nier l’évidence et finit par craquer : il confie ses penchants à son frère…qui le répètera à toute la famille. C’est le drame, tout le monde s’agite. La maman (Sigourney Weaver) prend les choses en main : elle pose des post it avec des passages de la Bible partout dans la maison et conseille à son fils de beaucoup prier pour ne pas s’exposer à cette atroce tentation. On l’emmène aussi chez un psy, on espère « le soigner ». Mais Bobby comprend que l’homosexualité est quelque chose de naturel, qu’il ne peut combattre. Il essaie de le faire comprendre à sa mère, en vain. Le climat se détériore au foyer jusqu’à amener Bobby à quitter les siens pour aller vivre plus librement chez sa cousine à Portland. Là-bas, il tombe amoureux d’un joli garçon et essaie de s’assumer davantage. Mais le rejet de sa mère qu’il aime tant le conduit à avoir des idées noires de plus en plus destructrices…

Adapté d’une de ces fameuses histoires vraies, Prayers for Bobby (Bobby seul contre tous en VF) est un téléfilm américain qui fut un succès surprise à travers le monde (dont en France sur M6 – succès qui lui permit d’être projeté brièvement en salles et de bénéficier en France d’une sortie DVD). Si la réalisation est, comme on pouvait s’y attendre pour un téléfilm, assez « télévisuelle » avec ce que le cliché comporte d’artifices et de passages légèrement trop appuyés, l’écriture assez habile et la conviction du jeu des acteurs finissent bel et bien par nous emballer.

bobby seul contre tous

L’action se situe à la fin des années 70. L’homosexualité n’est pas entrée dans les mœurs, surtout dans les petites banlieues américaines. Et l’arrivée du Sida, présenté comme « la maladie des homosexuels » ne va pas aider à apaiser les consciences. Le film montre à quel point des personnes peuvent être adorables, pleines d’amour et en même temps être remplies de préjugés sur certains points. Ici, la mère de Bobby est une maman aimante, dévouée à son fils. Mais elle va progressivement s’opposer à lui, voire le renier, car ce qu’il est ne va pas dans le bon sens des textes de la Bible (qu’elle prend au pied de la lettre).

Le rejet de la mère amène Bobby à se détester lui-même et à commettre l’irréparable. Une fois qu’il ne sera plus là, elle se posera davantage de questions, découvrira les églises ouvertes aux gays et constatera que les textes de la Bible peuvent être l’objet de diverses interprétations (par exemple un enfant qui n’est pas obéissant serait autant une abomination que l’homosexualité…avec ces textes chacun fait un peu son marché et les esprits mal intentionnés pourront toujours trouver de quoi nourrir leur besoin de condamner quelqu’un ou quelque chose).

Si tout ici est très classique, voire parfois assez attendu, le cheminement de cette mère bigote vers la lumière de la tolérance finit pourtant par nous mettre la larme à l’œil (surtout dès lors qu’elle entreprend de s’engager pour la défense des droits de la communauté LGBT – les dix dernières minutes atteignent des sommets d’émotion). Plus qu’en tant qu’œuvre de fiction,Prayers for Bobby existe en tant qu’outil de sensibilisation  auprès des ados, des familles, qu’elles soient cathos ou non. Un plaidoyer pour la tolérance abouti et donc forcément utile.

« Bobby seul contre tous » (produit en 2009) vient de bénéficier à l’heure de l’écriture de ces lignes d’une nouvelle édition DVD chez Outplay

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3