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CALL ME BY YOUR NAME : réminiscences du premier amour, chef-d’oeuvre d’émotions

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Le réalisateur italien Luca Guadagnino avait frappé un grand coup en 2010 avec « Amore ». Passé un « A bigger splash » qui avait davantage divisé, le voici de retour avec « Call me by your name », adapté du « Plus tard ou jamais » d’André Aciman. Et c’est un miracle de cinéma.

1981, Italie du Nord. Elio (Timothée Chalamet), 17 ans, vit dans la grande demeure de ses parents (Michael Stuhlbarg et Amira Casar). L’endroit est à couper le souffle, baigné d’un soleil radieux. C’est aussi un espace extrêmement stimulant, le père d’Elio étant un professeur aimé et respecté qui invite régulièrement chez lui artistes et intellectuels. Chaque année, le temps de quelques semaines, vient également séjourner un étudiant différent. Cette année, c’est Oliver (Armie Hammer), un bel américain, qui débarque.

call me by your name

Grand, blond, poli, beau : cet homme à l’allure de gendre idéal ne tarde pas à s’attirer la sympathie de tout le monde et à faire tourner la tête des filles des environs. Elio a plus de réserves sur ce personnages. C’est qu’au fond de lui, quelque chose se passe. Alors que jusqu’alors il tournait autour de la douce Marzia (Esther Garrel), la présence d’Oliver sème la panique dans son désir. Il est irrésistiblement attiré. Petit à petit, la tension sexuelle monte et elle semble partagée. Si dans un premier temps, Olivier souhaite résister, il ne pourra pas lutter longtemps contre cette attraction. Le temps de quelques jours hors du temps, un premier amour va naître pour Elio qui marquera sa vie à jamais.

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Tout n’est que beauté, splendeur même, dans ce film merveilleusement incarné, sensible, intelligent et attachant. On ne saurait trop expliquer comment mais à peine est-on entré dedans qu’on n’a plus jamais envie d’en sortir. Le raffinement est total. Il y a d’abord ce lieu de l’action, la maison des Perlman qui évoque souvent le décor du « Jardin des Finzi-Contini ». Une demeure de rêve, un certain confort bourgeois, idéalisé, au coeur duquel on se sent divinement bien. Les Perlman sont érudits et accueillants, ils sont toujours là pour partager des choses ou des idées. Les cultures se mélangent, on parle italien, français, anglais ou allemand. La musique succède au plaisir de la littérature, de l’archéologie ou du cinéma.

Visuellement, cette oeuvre de Luca Guadagnino est un régal. Chaque plan est d’une douceur folle, un délice de couleurs. On en prend plein les mirettes. Et comme si la photographie superbe ne suffisait pas, la bande-originale augmente encore la force d’attraction de l’ensemble entre musique classique, tubes vintage et compositions bouleversantes de Sufjan Stevens. L’intrigue est à la hauteur de la plastique avec des personnages qu’on aime tout de suite, des premiers rôles aux seconds, tous croqués avec une tendresse inouïe.

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La trame pouvait pourtant paraître assez classique (un ado de 17 ans et un homme plus âgé tombent amoureux au début des années 1980 où il n’est pas forcément facile de s’épanouir en tant qu’homosexuel) mais elle bénéficie d’un traitement, d’un regard, qui transcendent tout. On est complètement emporté pour à terme être renversé. C’est que Luca Guadagnino excelle dans l’art de filmer le sentiment amoureux et le désir. Si l’attraction entre Elio et Oliver peut être source de tension et de peur, elle s’incarne avec une finesse, une drôlerie, un érotisme romantique foudroyant. Cela faisait longtemps qu’on avait pas vu un film doté d’une sensualité si douce. Le film réussit l’exploit de nous faire ressentir des caresses (celle d’une main qui passe sur la nuque ou le dos ou qui fait du bien à des petits pieds), montre une sexualité tendre, piquante et ludique (et cela vaut aussi bien pour les passages gays qu’hétéros – au passage Esther Garrel est top dans le rôle de la petite amie sacrifiée, qui bénéficie ici d’un traitement poignant et lumineux).

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Armie Hammer et Timothée Chamalet forment à l’écran un couple vibrant dont le temps est compté (un peu comme dans le « Weekend » d’Andrew Haigh). L’effet d’une chanson pop obsédante qui fait ressurgir toutes les émotions et sensations du premier amour. Révélation totale du film, Timothée Chalamet est d’un érotisme dingue tandis qu’Armie Hammer est comme à son habitude à tomber à la renverse. Poétique, sensible, universel, « Call me by your name » nous saisit, ne nous lâche plus et fait couler les larmes. Chef-d’oeuvre, tout simplement.

Film présenté au Festival Chéries Chéris 2017 // Sortie en salles le 28 février 2018 

 

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3