CINEMA

CARNIVORES : Leïla Bekhti douce et vénéneuse dans un thriller léché

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On aime vraiment beaucoup Leïla Bekhti. Déjà, on la trouve trop belle et on adore le grain de sa voix. Elle a une intensité que la majorité des jeunes actrices françaises peuvent lui envier. Autant dire qu’on était plus qu’impatient de la voir tourner dans un drame réalisé qui plus est par les frères comédiens Jérémie et Yannick Renier.

carnivores leila bekhti

Ce premier long-métrage en tant que cinéastes de la Team Renier est un thriller dont la thématique peut faire penser au chef d’oeuvre « Eve ». Soit la trajectoire de Mona (Leïla Bekhti), jeune et belle comédienne pleine de talent qui n’arrive jamais à avoir le moindre rôle. Un cruel manque de chance qui peut être d’autant plus frustrant que sa soeur, Sam (Zitra Hanrot), a pour sa part percé et enchaîne les collaborations prestigieuses avec des réalisateurs de renom.

Sans le sou, Mona vient habiter chez sa soeur. Pas de doute : à tous les niveaux, Sam a plus réussi qu’elle. Outre sa carrière en pleine ascension, elle est la mère d’un adorable petit garçon et a épousé un jeune homme désirable en la personne de Manuel (Bastien Bouillon). Mona s’accommode des miettes qui restent et vit par procuration. Il s’avère pourtant que les apparences sont trompeuses : Sam est bien plus malheureuse que son actrice de soeur au chômage. Le monde du cinéma l’asphyxie, elle se sent manipulée et incomprise, son couple vacille…

Un jour, Sam disparait. Personne ne sait s’il s’agit là d’un acte égoïste et volontaire ou d’un accident tragique. Son absence pèse sur les siens mais au bout d’un moment commence paradoxalement par rendre la vie de Mona meilleure : sans sa soeur envahissante dans les parages, elle attire davantage les regards…

carnivores leila bekhti

Jérémie et Yannick Renier font ici le pari de la sobriété dans le ton. « Carnivores » aurait pu facilement, comme les récents « D’après une histoire vraie » ou « Eva », se laisser aller à la tentation du thriller bitchy avec les maladresses en forme de plaisir coupable qui vont avec. Certes pour le coup c’est moins rigolo mais ce choix du premier degré à toute épreuve vaut au long-métrage de témoigner d’une véritable intensité. On ressent toute la frustration de Mona, actrice de l’ombre qui a une vie de rêve devant elle qu’elle ne peut que contempler. Vie de rêve, c’est toutefois vite dit. Si Mona persiste à idéaliser le monde du cinéma, sa soeur en fait une expérience dévastatrice.

Il est assez rare de voir dans un film une vision aussi triste du cinéma. Les plateaux de tournage ressemblent au bagne, n’ont rien de magique et les réalisateurs sont montrés comme des êtres pervers qui jouent avec les nerfs de leurs actrices (ce n’est pas un hasard su le personnage de Sam joue dans une adaptation d’une oeuvre de Sade…). « Carnivores » matérialise le malaise d’une actrice un peu connue qui commence à ne plus savoir qui elle est, qui se laisse dévorer par son métier et se retrouve dans une situation complexe : elle est épuisée, elle n’est pas heureuse et personne ne veut la plaindre car faire du cinéma est un rêve pour tant de gens. Se plaindre quand on fait ce travail, c’est forcément paraître ingrat. Et pourtant tout n’est pas toujours rose et on a vite fait d’y devenir fou…

Cet aspect est sans doute le plus intéressant de ce premier long ainsi que l’interprétation hyper juste, précise, nuancée et sensible de Leïla Bekhti. Pour le reste, il faut avouer que le scénario souffre hélas d’un air de déjà vu (on est très peu surpris par la tournure que prend l’intrigue et le dénouement, prévisible, déçoit un peu). Mais il est contrebalancé par une mise en scène joliment atmosphérique et anxiogène qui sonde les âmes fragiles et possiblement perverses de ses héroïnes ambivalentes.

Film sorti le 28 mars 2018

LE CRUSH DU FILM

En compagnon « ordinaire » mais charnel (et possiblement ombrageux), Bastien Bouillon ne manque pas de charme. Une scène le montre assez torride (et avec une belle paire de fesses, Mazette !) au lit avec Zita Hanrot en pleine action. On comprend que le personnage principal ne soit pas contre lui mettre le grappin dessus… Un beau ptit Bouillon de sexy !

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3