CINEMA

DRIVE de Nicolas Winding Refn : d’amour et de sang

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The Driver (Ryan Gosling) est un jeune homme travaillant dans un garage le jour, officiant occasionnellement comme cascadeur pour des tournages hollywoodiens et acceptant d’être la nuit le chauffeur téméraire de truands quand l’occasion se présente. Une vie guidée par la vitesse, le risque, amenant aussi à une certaine solitude. Réglo, ce conducteur de charme, peu bavard, prévient les malfrats avec lesquels il bosse : il fait son boulot mais n’est impliqué en rien dans les braquages et autres mauvais coups. Il se donne à fond mais si ses partenaires d’une nuit dérapent, il ne joue plus avec eux.

Le business marche plutôt bien, l’existence est un peu terne, puis soudain, The Driver fait la rencontre d’Irene (Carey Mulligan) et de son petit garçon. Il se prend rapidement d’affection pour cette fille qui n’est autre que sa voisine. Son mari est en prison. En quelques jours, ils se rapprochent, donnant la sensation au beau conducteur de revivre. Mais voilà que le mari revient de taule, pile quand une romance commençait à s’instaurer. Et il ramène avec lui de nombreux problèmes : il est victime de chantage d’hommes qui le protégeaient en prison, qui lui réclament désormais beaucoup d ‘argent, l’obligent à participer à des missions risquées car s’il n’obéit pas ils tueront sa femme et son enfant.

The Driver lui offre son aide, espérant éloigner tout problème de celle qu’il aime. Mais les choses dérapent et Irene est définitivement en danger. Pris dans une spirale infernale où la mort rode constamment, il va devoir partir à la recherche des truands qui sont à l’origine de tout ce bazar et tenter de les supprimer un à un…

drive nicolas winding refn

Nicolas Winding Refn semble revenir avec Drive à ses premiers amours (ceux de l’excellente Trilogie Pusher) . C’est un des plus gros succès de sa filmographie, avec un excellent casting américain, plus de moyens et un côté plus universel (même si la violence reste toujours très présente). Ça commence fort avec un braquage tendu. Le silence, la peur, le risque, la musique qui palpite : sensations fortes garanties. Une façon de nous montrer que The Driver risque un peu sa vie à chacun de ses coups. On peut être surpris par un générique pop (tout en lettres roses), évoquant les années 1980. Et c’est ce qui fera toute la différence avec tous les autres films du genre. Drive est en effet loin de se contenter d’être un bon film d’action burné. Il vise bien plus haut et y parvient. Les courses poursuites sont moins nombreuses que ce à quoi on pouvait s’attendre, le suspense est aussi et surtout sentimental.

Visuellement magnifique (le film a obtenu le prix de la mise en scène à Cannes 2011), ce portrait d’un homme solitaire par définition (référence à la fable du « scorpion et de la grenouille »  évoquant la nature irrémédiable de chacun) prend aux tripes. Chaque protagoniste semble pris dans un cercle vicieux (L’ex taulard qui à peine sorti réalise qu’il n’aura pas droit à la rédemption ; le garagiste qui a toujours été mêlé à des affaires louches et qui n’en sortira jamais mais aussi The Driver qui par les risques qu’il prend ne pourra jamais s’autoriser de véritables liens humains sans risquer de tout perdre ou Irene qui sans le vouloir craque toujours pour des hommes à problèmes). Route semée d’embûche, où les accidents semblent inévitables…

drive nicolas winding refn

De nuit comme de jour, le parfum du danger ne s’évapore jamais et plus le temps passe et plus les choses se corsent. La grande force du cinéaste est de livrer une œuvre réellement tendue tout en s’autorisant souvent une certaine lenteur. D’insuffler dans un genre souvent un brin macho une sensibilité rare, de laisser de la place à la contemplation. Magnifié, iconique, Ryan Gosling trouve là un de ses rôles les plus emblématiques. Il est parfait pour camper ce personnage complexe (beau, tendre, un mec bien mais aussi capable d’une forte violence, dont les motivations « professionnelles » resteront toujours plus ou moins floues, comme si elles étaient simplement de l’ordre de sa nature).

Aussi bien descente aux enfers où le sang gicle que love story impossible, Drive, avec une folle maitrise, fait vibrer, secoue et émeut. Grand film.

Film sorti en 2011. Disponible en DVD et VOD

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3