COURTS
EDEN ET CHARLIE de Benoit Duvette : âmes solitaires et poétiques
De tous les courts-métrages à thématique gay présentés en cette année 2024 au Festival Chéries Chéris, c’est sans doute le plus mystérieux. Eden et Charlie nous perd, nous entête, avec un travail sur la photographie remarquable.
Benoit Duvette avait déjà troublé les amateurs de courts-métrages avec son intrigant Ruines. Il raconte avec Eden et Charlie une nouvelle histoire d’amour adolescente pleine de fêlures avec un style toujours aussi affirmé et une esthétique radicalement opposée. Là où Ruines embrassait l’obscurité et flirtait avec le chaos, ce nouveau court-métrage accorde une place déterminante à la lumière.
Un été, à une date que l’on ignore, le solitaire Eden squatte une maison abandonnée pour réaliser des auto-portraits. Il cherche son personnage photographique et lui-même au passage. Il découvre qu’un autre garçon trouve refuge dans la maison, Charlie. Comme lui, Charlie a l’air d’être heurté par le monde extérieur et a besoin de s’évader. Deux solitudes qui se rencontrent, qui pourraient se compléter et au final s’annuler pour donner lieu à un amour, un tout.
Pensé comme un ensemble poétique, le film met les images et l’atmosphère au premier plan et nous invite à nous perdre, à l’instar des protagonistes, dans cette belle maison vide nimbée de secrets. Eden et Charlie ont l’air différents de prime abord (Eden est plus taiseux, renfermé sur lui-même, plus dur à cuire là où Charlie apparait plus doux, souriant, solaire, désireux d’aller vers l’autre). Mais au fil du métrage on découvre qu’ils ont tous les deux de profondes fêlures, qu’ils oscillent entre lumière et ténèbres.
Que se passe-t-il et que se joue-t-il entre ces murs ? Qui sont vraiment Eden et Charlie ? Sont-ils réels ? A quelle époque évoluent-t-il ? Que cherchent-ils ? Les questions abondent alors que les deux garçons s’apprivoisent, se découvrent et se rapprochent à travers l’art de la photographie. La photographie est en effet le moyen pour eux d’échanger (via l’appareil d’Eden ou des photographies qui ont l’air très anciennes que préserve Charlie), de s’envisager, de se mettre en scène ou de se découvrir. Un langage en soi, une passerelle pour deux âmes en pleine errance.
Hanté et abstrait, Eden et Charlie déploie sa petite musique fantomatique et marque par ses très belles images et les interprétations pleines de vulnérabilités de ses deux comédiens, Augustin de Winter et Néven Carron.
Film produit en 2024 et présenté au Festival Chéries Chéris 2024 / Projeté le vendredi 22 novembre à 22h au MK2 Beaubourg et le mardi 26 novembre à 14h20 au MK2 Beaubourg