FICTIONS LGBT
LA DANSEUSE de Stéphanie Di Giusto : passion et sacrifices
Loïe Fuller (Soko) rêve de devenir danseuse. Mais le parcours sera long pour cette jeune fille un brin sauvage ayant grandi dans l’ouest américain. Après la mort de son père, elle débarque à Paris. Grâce à la complicité de Louis (Gaspard Ulliel), un dandy névrosé secrètement amoureux d’elle, elle prend peu à peu confiance et s’affirme. Loïe dessine les contours d’une nouvelle danse, la Serpentine, qui apporte aux prestations jusqu’alors classiques un caractère relevant de la performance. Les idées fusent dans sa tête, quitte à lui faire perdre parfois la raison. La passion l’emporte souvent sur l’état physique. Deuxième aide et pas des moindres, celle de Gabrielle (Mélanie Thierry), qui l’introduira à l’Opéra de Paris pour un spectacle inédit et d’exception. Comme Louis, Gabrielle désire dans le silence cette danseuse habitée et tourmentée. Mais c’est pour la jeune Isadora Duncan (Lily-Rose Depp) que battra le coeur de Loïe, l’entraînant dans une fascination et une passion à sens unique aussi vertigineuse que vénéneuse.
Adaptation libre de la vie de Loïe Fuller, La danseuse est un premier film prometteur et ambitieux. L’incroyable destin de cette danseuse avant-gardiste est narré avec élégance et se permet, notamment lors des passages dansés, des envolées pleines de grâce. Mais si le parcours artistique de Loïe Fuller est la toile de départ et le fil rouge, la réalisatrice Stéphanie Di Giusto délivre surtout un portrait de femme sentimental et profond.
Bien qu’Isadora Duncan occupe toute la place dès son arrivée tardive dans le récit, le spectateur comprend bien que la pauvre Loïe aura tout à perdre en poursuivant son obsession pour cette artiste surdouée mais qui joue aussi de ses charmes pour profiter d’elle. Les deux plus beaux personnages du film sont sans l’ombre d’un doute les « amoureux sacrifiés » qui restent toujours au second plan sans ne jamais s’effacer.
D’une part le personnage de Louis, névrosé et drogué, qui derrière son apparence bon chic bon genre cache un terrible mal de vivre. La passion de Loïe lui amène le souffle de vie dont il a besoin. Mais, et ce dès le début du métrage, on comprend qu’il n’aura que très peu de chances de la conquérir. Les hommes n’apparaissant ici que comme, au mieux, des épaules rassurantes, substitution au père absent, au pire des menaces. Jamais le plaisir ne ressort vraiment des étreintes entre Loïe et les figures masculines.
La douce Gabrielle, discrète et omniprésente, attend pour sa part sans trop espérer que Loïe la regarde enfin. C’est elle qui dans la deuxième partie du métrage sera toujours là pour la sauver et l’épauler sans condition.
Attachant, joliment interprété et sensible, La danseuse est un récit de passion (la danse, Isadora Duncan) entre frénésie, épuisement et nouveaux départs.
Film sorti en 2016 et disponible en VOD