CINEMA

LA MAIN AU COLLET de Alfred Hitchcock : vols et séduction

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Sur la Côte d’Azur, les femmes riches ne sont plus tranquilles : un voleur acrobate surnommé « The cat » dérobe leurs bijoux aux valeur indécentes. Nombreux sont ceux à penser qu’il s’agit là du retour de John Robie (Cary Grant), sorte d’Arsène Lupin. L’homme, qui s’était engagé dans la résistance en France avec quelques camarades repris de justice pour échapper à la prison, vit « en retraite » dans une somptueuse villa. Et il se trouve que les nouveaux vols de bijoux ne sont pas son œuvre mais celle d’un esprit malin qui a parfaitement assimilé et reproduit son style.

Refusant de se retrouver derrière les barreaux, John Robie décide de mener son enquête sur la Riviera, en s’associant à un assureur peu scrupuleux. Ce dernier lui fournit une liste des plus grandes fortunes qu’il compte parmi ses clients afin que John puisse tenter d’arrêter le voleur. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de Madame Stevens et de sa fille Frances (Grace Kelly). Faussement sage, la jeune femme fait du rentre dedans au voyou/enquêteur avant de se détourner de lui, pensant qu’il est celui qui lui a volé un des biens de la famille. La police aux trousses, Robie va devoir rapidement élucider le mystère sur le malfrat qui fait tout pour l’accabler s’il ne veut pas renoncer à sa liberté…

Premières minutes du film, une femme hurle. On jurerait qu’elle vient de trouver un cadavre mais il n’en est rien : on lui a « simplement » volé ses bijoux. Le ton est donné : face à ce Hitchcock léger et à part, nous passerons plus de temps à sourire qu’à frémir. Magnifique lumière, couleurs enchanteresses : on se laisse volontiers séduire par les charmes de la Riviera, ici à la fois sublimée et tournée en dérision. Ainsi, durant une course poursuite au marché, qui manque étonnamment de suspense, Hitchcock nous fait sourire quand Robie est attrapé par une vendeuse de fleurs hystérique, voulant protéger ses biens. Chacun détient des choses qu’il ne voudrait perdre pour rien au monde. Bijoux aux valeurs insolentes ou sentimentales, mais aussi la réputation et l’honneur. Insupportable idée pour John Robie que de se faire finalement coincer pour des actes qu’il n’a pas commis.

En opposition, certains se moquent de ce qu’ils ont à perdre . Madame Stevens n’est pas inquiète pour ses petits trésors, elle trouverait presque cela excitant qu’on les lui pique et quand elle découvre que John Robie est un gentleman cambrioleur, cela ne semble que confirmer toute la sympathie qu’elle a pour lui. Lors d’un déjeuner avec son « complice » assureur, John Robie lui fait remarquer que tout le monde à sa façon est un voleur. Tout le monde triche un jour avec des notes de frais ou s’autorise de petits larcins. John Robie a simplement vu plus grand par le passé et il est aujourd’hui exposé à toutes les suspicions.

Dans un climat de vacances, de comédie romantique, la quête du mystérieux voleur se poursuit alors que Frances Stevens jette son dévolu sur le très charmant John Robie. Tout le film durant règne une forte tension sexuelle et La main au collet atteint des sommets lors de la mythique scène du couloir de l’hôtel où Grace Kelly embrasse par surprise le beau Cary. Inoubliable également est la scène où ils regardent un feu d’artifice exprimant leur désir explosif. Plus troublants enfin sont les passages sur la plage durant lesquels John Robie semble se perdre en contemplant un bel homme du coin. Finalement peu entreprenant avec les femmes, Robie serait-il un homme « sensible » ?

Si la trame de La main au collet est légère, le long-métrage n’est pas pour autant , comme beaucoup ont pu le dire, un des films mineurs d’Hitchcock. Ces vacances loin du « vrai » film policier sont un régal de chaque instant, aussi bien pour la beauté des images du sud , pour l’alchimie explosive de Grace Kelly et Cary Grant que pour un scénario riche en dialogues incisifs (et le plaisir de voir se mélanger français, anglais et américains). A noter enfin qu’ici les femmes ont le pouvoir : ce sont elles qui draguent les hommes et se révèlent être des adversaires redoutables.

Film sorti en 1955. Disponible en DVD et en VOD

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3