CINEMA

LES FANTÔMES D’ISMAËL de Arnaud Desplechin : labyrinthe

By  | 

Présenté à sa sortie comme un triangle sentimental, Les fantômes d’Ismaël est en réalité beaucoup plus que ça. Un labyrinthe dense, touffu, dans lequel le spectateur est invité à se perdre.

Nous suivons Ismaël (Mathieu Amalric), réalisateur doucement névrosé en plein chantier de son nouveau long-métrage inspiré de l’histoire de son frère Ivan Dedalus (Louis Garrel) longtemps soupçonné d’être un espion. Depuis plusieurs années, Ismaël est au moins apaisé dans sa vie personnelle. Il partage une relation tendre, complice et apaisée avec la douce Sylvia (Charlotte Gainsbourg). Sylvia lui a en quelque sorte permis de réapprendre la vie, de tourner le dos à ses démons.

Le démon et fantôme principal d’Ismaël, c’est Carlotta (Marion Cotillard), fille tourmentée d’un autre cinéaste qu’il a aimé follement. Ils se sont mariés jeunes et puis un jour Carlotta a disparu. On ne l’a plus jamais retrouvée, elle a été déclarée « absente », on la présume morte. C’est peu dire que tout est chamboulé quand un jour elle refait surface avec qui plus est la ferme intention de récupérer Ismaël.

Il y a donc d’un côté le triangle sentimental (touché par la grâce avec les interprétations de Marion Cotillard et Charlotte Gainsbourg) et de l’autre le projet du long-métrage d’Ismaël. Ces deux faces sont des portes d’entrée vers d’autres couloirs qui s’amusent entre réalité et fiction, passé et présent. Parfois on s’y perd, on ne sait plus bien où l’on est (notamment lors des passages avec Ivan Dedalus). La proposition d’Arnaud Desplechin est originale, libre, intrigante même si elle prend le risque de trop en égarer certains, de perdre en lisibilité.

Comme un grand tableau abstrait plein de couches différentes, Les fantômes d’Ismaël est une réflexion riche en mystère et en éclats sur les histoires qui nous font et nous défont, la multiplicité de la vie, la difficulté de composer avec le présent et de faire la paix avec son passé. L’ensemble est vertigineux, troublant, parfois déconcertant. On ne pourra pas reprocher à Arnaud Desplechin de ne pas prendre de risques.

Film sorti en 2017 et disponible en VOD

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3