CINEMA

LES OISEAUX de Alfred Hitchcock : en cage

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Mélanie Daniels (Tippi Hedren), mondaine sulfureuse et fille d’un magnat de la presse, rencontre un jour par hasard, chez un marchand d’oiseaux, l’avocat Mitch Brenner (Rod Taylor). Légèrement mufle sur les bords, pas moins séducteur pour autant, l’homme tape dans l’œil de la demoiselle légère. Quelques jours plus tard, la voilà en route pour Bodega Bay afin de déposer des oiseaux inséparables (Mitch était venu chez le marchand pour en trouver, espérant faire une surprise à sa jeune sœur Cathy). Alors que la surprise fait son effet, Mélanie et Mitch pourraient commencer à songer à la phase d’accouplement. Mais la belle rentière est subitement attaquée par une mouette étonnamment sauvage. Fatiguée, sollicitée pour assister à la fête d’anniversaire de Cathy, elle décide de rester plus longtemps que prévu dans les parages. Grossière erreur. Comme si le fait de dormir dans une chambre d’hôte appartenant à l’ex de Mitch ne suffisait pas, la mère de ce dernier apparaît sacrément suspicieuse. Et du ciel descend une multitudes d’oiseaux, enragés sans raison, prêts à attaquer tous les habitants de Bodega Bay…

les oiseaux hitchcock

Si les effets spéciaux de ce long-métrage « horrifique » d’Hitchcock peuvent aujourd’hui sembler démodés, Les Oiseaux donne toujours autant la chair de poule. Il faut dire que les attaques des volatiles sont pour le moins sauvages, oppressantes. Avec un sens du rythme aiguisé, le cinéaste alterne scènes « traditionnelles » et passages d’attaque, d’invasion. Et quand les oiseaux envahissent le champ, c’est pour venir cruellement bécoter jusqu’au sang les femmes comme les enfants. Le travail remarquable sur le son permet d’instaurer à chaque apparition de ces vilains monstres une véritable terreur. Le fait que les oiseaux soient d’habitude perçus comme des créatures tout ce qu’il y a de plus joli et attendrissant et qu’ici ils attaquent sans aucune raison précise contribue à assurer le malaise.

Fils à sa maman, Mitch Brenner a déjà par le passé sacrifié son propre bonheur pour rester aux côtés de celle qui lui a donné la vie (au grand dam de son ex institutrice). Quand « la fille des villes » Mélanie Daniels débarque sur sa terre natale, c’est forcément la panique. La mère Brenner a peur d’être abandonnée et se méfie des charmes trop évidents de la belle. Mitch peut-il se fier aux discours de Mélanie, semblant être en pleine quête de rédemption ? Parviendra-t-il à quitter la maison familiale ? Pas si vite…La menace Mélanie laisse place à la menace des volatiles. Les choses s’inversent : pris de paniques, les hommes s’enferment dans leur foyer en forme de cage alors que dehors les corbeaux et autres mouettes font la loi. Alors que la mort rode, les masques tombent. La mère de Mitch brise la glace, reconnaît ses excès et tombe progressivement sous le charme de Mélanie, plus douce et courageuse qu’elle ne le pensait. Mais il est peut-être déjà trop tard…

les oiseaux hitchcock

Les effets datés lors des attaques ne gâchent pas le plaisir tant la réalisation d’Hitchcock ne manque pas de panache. A chaque apparition des oiseaux on a la sensation d’embarquer pour un tour de grand 8. Des scènes frénétiques. Autant film d’horreur que drame intime, le long-métrage est constamment jouissif et fait sans doute partie des œuvres les plus sadiques du maître Alfred. Faussement bitchy et glamour en toute circonstance, Tippi Hedren y est la tentation incarnée…avant de devenir une martyre. Inoubliable.

Film sorti en 1963. Disponible en DVD

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3