FICTIONS LGBT
LUCIÉRNAGAS de Bani Khoshnoudi : l’épaule d’une amie
Un arrière-plan politique, un personnage principal tout sensible, la beauté de Veracruz et une belle histoire d’amitié : Luciérnagas de la réalisatrice iranienne Bani Khoshnoudi est une belle réussite qui touche droit au coeur.
Veracruz, Mexique. Ramin (Arash Marandi) trime en espérant partir rapidement vers la Grèce ou la Turquie. Il a fui l’Iran, sa terre natale, en raison de son homosexualité qui lui a valu d’être lourdement persécuté. Il espérait atterrir en Grèce en prenant un bateau mais il s’est retrouvé là. Il a laissé derrière lui son compagnon qui lui manque et dont l’idée de ne plus jamais le revoir lui est insupportable.
Ses espoirs volent en éclat quand il réalise que s’il veut quitter Veracruz il va devoir mettre de côté beaucoup d’argent. Et ça n’est pas avec ses petits boulots mal payés qu’il va pouvoir aller vers de nouveaux horizons rapidement. Alors il attend et vit au jour le jour. Il loge dans un petit hôtel tenu par Leti (Flor Eduarda Gurrola) et le père de celle-ci. Il va progressivement se lier d’amitié avec elle alors qu’elle accepte de lui donner des cours d’espagnol. Ils ont en commun un certain mal de vivre en raison de leur solitude. Ramin va aussi se lier d’amitié avec un de ses collègues de chantier, le très viril Guillermo (Luis Alberti) qu’il va doucement désirer en secret…
C’est un joli film d’errance, le portrait plein de sensibilité d’un jeune homme qui se cherche alors qu’il n’a plus de repères. Ramin a quitté l’Iran tout simplement pour survivre et même si cela lui a brisé le coeur. Veracruz n’est pas l’endroit où il souhaitait aller, il a envie de fuir mais il est bloqué. Le quotidien est difficile, il est blessé, perdu et ne sait ni quoi faire ni comment être. Peut-il vraiment être totalement lui-même avec les nouveaux amis potentiels qu’il rencontre ? Il s’interroge, avance à tâtons.
Si Luciérnagas comporte son lot de scènes difficiles et montre bien la douleur et les cicatrices d’une persécution homophobe tristement actuelle dans certains pays, sa réalisatrice en fait par petites touches une oeuvre doucement tendre et solaire. C’est bien connu : c’est souvent alors qu’on se sent le plus perdu qu’on peut finalement finir par trouver sa place. La caméra s’attarde beaucoup sur le visage de l’acteur principal, le beau et sensuel Arash Marandi, qui déborde de sensibilité. Mais la caméra capte aussi et surtout l’atmosphère des rues de Veracruz qui au-delà de la misère et des coeurs brisés révèle sa beauté, ses couleurs, sa musique.
Quitte à se prendre des coups, le personnage principal va avancer le temps d’un peu moins d’une heure trente, apprenant à accepter que son homosexualité ne doit pas forcément être vécue dans le secret ou la douleur. Et pour cela il suffit simplement du regard bienveillant d’une amie. Dans la peau du personnage de Leti, Flor Eduarda Gurrola est de ces actrices dont le jeu sonne plus vrai que nature et qui réchauffe les coeurs. On ressort du film très touché, emballé par la beauté de la mise en scène et une écriture humaniste, comme une caresse.
Film produit en 2018 et présenté au Festival Chéries Chéris 2019. Sortie au cinéma le 22 janvier 2020.