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Midget !, Lumière d’en bas : mystère et beauté

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Midget ! c’est Mocke et Claire Vailler (rencontre ici), duo sans étiquette qui nous invite à un voyage poétique et cinématographique en diable. A l’écoute de leur premier album, Lumière d’en bas, le temps se fait mouvant et les mots retrouvent un mystère inespéré. On plonge, on se perd, on tombe amoureux, on tombe tout court. On ferme les yeux et on se laisse guider par une voix joueuse, séduisante, vénéneuse, qui parvient à être tout à la fois. Bref, insaisissable.

Beauté inestimable de l’abstraction. As in a ball évoque une contine ou une berceuse, Don’t ever est aussi bouleversant qu’une déclaration d’amour ou une rupture définitive, Low water nous plonge dans la brume la plus totale, The scottish way nous donne la sensation de sautiller dans les recoins les plus insoupçonnés de notre inconscient. On avance et on s’égare, on est pourtant allongés les yeux fermés. On part très loin, le cœur s’ouvre, se serre. Des tas de magnifiques paysages, de décors, se dessinent dans nos têtes. Il suffit d’un accord, d’un couplet, d’un seul mot même, pour que naisse l’obsession.

Le morceau Corrazon se déploie. « Dans ma rue des centaines de formes restent sur le carreau… ». On se repasse le morceau des dizaines de fois, et les poils s’hérissent toujours de la même façon sur cette phrase qui se lance, cet air, cette voix. Impossible de comprendre pourquoi. Est-ce le goût de l’improvisation, de l’aventure, le fait de transformer chaque titre en poème, en histoire aux interprétations infinies, qui ravit autant ? Impossible à dire. Quelque chose foudroie, souvent quand on s’y attend le moins. Parfois du premier coup, parfois plus tard. Pour qualifier à sa juste valeur ce disque, il faudrait le fredonner. Ou bien le décrire en esquissant le plus pur des sourires. Un sourire comme celui que l’on peut avoir quand l’espace d’un instant plus rien n’a d’importance : on est juste bien, on est là mais ailleurs, tout n’est plus que caresse, douceur.

midget album

C’est un album qu’on prendrait autant de plaisir à lire qu’à écouter. On se l’approprie, on s’envole grâce à lui vers de nouveaux mondes imaginaires. On y croise des personnes, des fantômes, des souvenirs. Aussi élégant et troublant en français qu’en anglais, chaque titre à sa propre atmosphère, porté par une rare vulnérabilité. Les mailles, Sleepwalker, Le vert et le gris, A ciel ouvert : on aurait envie de citer tous les titres juste pour le plaisir, juste pour se remémorer tout ce qui nous est passé par la tête en les découvrant. Multitude d’émotions et de sensations. On devient sentimental, comment ne pas le devenir quand une musique vous touche comme ça, belle comme un miracle ?

Touché par la grâce de la première à la dernière minute, faisant l’effet d’une séance d’hypnose, Lumière d’en bas est si envoûtant qu’on jurerait qu’il s’agit d’un mirage, d’une voix qui résonne dans notre tête, presque trop familière pour être réelle. On se repasse le disque, jusqu’à la déraison. Il ne s’épuise pas, le mystère reste entier. Lumière d’en bas existe bien, et c’est un vrai trésor.

Disponible sur Itunes, sortie physique le 28 novembre 2012 / En écoute sur Deezer

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3