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QUE VIVA EISENSTEIN ! de Peter Greenaway : passion d’hommes

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1931. Sergueï Eisenstein n’a plus la côte à Hollywood et entretient des relations un poil conflictuelles avec l’URSS. N’en faisant qu’à sa tête, il se rend à Guanajuato pour tourner un nouveau film, Que viva Mexico ! Très vite, l’artiste se lie d’amitié avec Palomino Canedo (Luis Alberti, ultra HOT) son guide mexicain. Ce dernier, homme marié et papa, lui fait découvrir sa ville, son pays, partage en sa compagnie tout un tas de discussions profondes, existentielles.

Sentant que derrière le génie se cache un homme frustré, un homosexuel refoulé, Palomino se prend d’affection et voit son désir grandir vis à vis d’Eisenstein. Un soir, il décide de l’initier au sexe. C’est le début d’une passion qui changera à jamais la vie du cinéaste. 

que viva eisenstein film

Etonnante proposition que ce nouveau long-métrage de Peter Greenaway. On aurait pu s’attendre à un biopic un peu austère, politique, une plongée dans le cinéma d’Eisenstein mais au final il n’en est rien. Le réalisateur s’évertue plutôt à constituer une sorte de portrait mental et très esthétique du célèbre cinéaste. Extrêmement vivant, débordant de passion, le projet regorge d’idées et nous entraîne dans un tourbillon créatif riche en références. C’est beau, très ludique à regarder bien que le débit de parole soit assez exigeant. Dans le rôle principal, Elmer Bäck en fait joyeusement des tonnes, incarnant un Eisenstein barré, enfant terrible, entretenant une relation trouble avec son propre corps et ses désirs.

Pour notre plus grand plaisir, l’homosexualité et plus globalement la découverte de la sexualité est au coeur du film. Luis Alberti, diaboliquement charmeur et charnel, va initier Eisenstein au sexe et l’amener à vivre avec délice des pulsions qu’il tenait jusqu’alors secrètes. Les scènes d’intimité flirtent avec l’explicite, sont d’un érotisme explosif et Greenaway nous fait ressentir toute l’ébullition, la fièvre qui prend possession d’un homme qui découvre son corps, la jouissance, et qui pour le coup se sent plus libre que jamais. Beauté du sexe, des échanges, sensation vertigineuse de la passion qui donne des ailes mais peut aussi donner l’impression d’être au bord d’un précipice.

Généreux, drôle, évoquant l’air de rien, avec une insouciance de facade, une multitude de thèmes essentiels, Que viva Eisenstein ! est une oeuvre qui part joyeusement en vrille, joliment imprévisible, sensuelle. Ou la parenthèse enchantée (et le retour de bâton qui va avec) peu connue d’un artiste majeur.

Film sorti en 2015 et disponible en VOD

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3