MULTIPOP

Skins, saison 2 (2008) : épreuves de l’adolescence

By  | 

Après une première saison convaincante mais un peu trop figée par sa quête de hype, Skins revient avec de nouveaux épisodes. On prend les mêmes, on ajoute quelques nouveaux et on recommence ! Chaque épisode est donc une fois de plus centré sur un ado en particulier, moyen d’évoquer avec plus ou moins de réalisme tous les problèmes liés à cet âge ingrat. La pate particulière de Skins est que ces ados-là sont ultra branchés, qu’ils évoluent dans un univers trash et underground et vivent en bande, souvent libérés de toute autorité parentale (les adultes sont majoritairement dépeints comme des gros cons, incapables de saisir les états de leurs progénitures).

La saison 1 s’achevait sur un incident tragique : l’explosion du couple Tony/Michelle et l’accident du garçon, renversé par un bus. Le geek Sid devait également affronter sa séparation forcée avec la doucement folle et anorexique Cassie. Les premiers épisodes reviennent ainsi sur ces évènements sentimentaux qui vont pousser nos jeunes amis à évoluer, en bien ou en mal. Tony, véritable tête à claque des premiers épisodes devient du coup beaucoup plus intéressant. Transformé par la maladie, légèrement handicapé, le garçon le plus populaire de la bande des enfants perdus va galérer pour se réinsérer. Oubliant son narcissisme et sa cruauté, Tony devient petit à petit plus responsable et aimerait bien reconquérir son ex Michelle, dont il avait brisé le cœur. Mais celle-ci va panser ses blessures avec Sid, meilleur ami de Tony et affecté par sa séparation avec Cassie. De quoi construire un carré amoureux assez efficace et riche en pics scénaristiques.

Contrairement à beaucoup de séries teenagers qui ont tendance à tout magnifier et dramatiser, les personnages de Skins ont des réactions parfois surprenantes face à des évènements d’une grande dureté. On peut être autant affecté d’une brouille avec un ami que de la mort d’un parent et au final c’est un peu toujours la même conclusion : il faut essayer de passer à autre chose. La saison 2 est l’année de la Terminale, des grands examens et donc forcément celle où les avenirs des uns et des autres se profilent. Dans ce sens, la série va assez vite , nous n’aurons eu que deux petites saisons pour entrer dans la bande et maintenant que l’on en est imprégnés il faut déjà songer aux au revoir. Assez dur à vivre en tant que spectateur. Et d’autant plus que cette nouvelle saison est riche en évènements et en émotion.

Amitiés perturbées (Tony et Sid séparés par leur amour pour Michelle ; Max et Anwar perturbés par l’arrivée de la tordue Sketch), amours sur le fil (le carré Tony/Michelle/Sid/Cassie ; la nouvelle relation fragile entre Jal et Chris ; l’obsession de Sketch sur Maxxie), vie de famille désastreuse et avenirs incertains : en quelques mois ils vont tous passer par les pires épreuves. On pourra reprocher à la série de prendre un tournant plus soap mais en tout cas force est de constater qu’elle gagne nettement en profondeur. Chaque épisode est une nouvelle plongée dans la vie d’un personnage avec des univers plus approfondis et marqués. A chaque fois, une bande originale qui colle à merveille, un second degré bienvenu et une certaine lucidité qui n’empêche jamais la sensibilité des protagonistes d’éclater. L’amour obsessionnel de Sketch pour Maxxie, les frontières floues entre trip et réalité dans un épisode centré sur Tony, la quête identitaire de la sublime et fêlée Cassie…En particulier dans sa deuxième partie de saison, Skins atteint les sommets du genre. Par une réalisation soignée qui nous plonge dans un univers unique, par le choix ingénieux des chansons et par des personnages universels qui se détachent des caricatures.

Personnellement, je n’ai jamais caché mon amour pour le personnage de Cassie. Adolescente complètement borderline qui oublie (volontairement) de manger et qui est ravie que l’on se préoccupe de ses troubles. A la fois belle et complexée, bitch fatale et enfant perdue, ce personnage éclairé par la renversante Hannah Murray (qui par moments ressemble furieusement à une certaine Michelle Williams) m’a offert des moments de plaisir que j’ai rarement ressenti devant une série. Un des épisodes de fin de saison centré sur elle est tellement beau et maitrisé qu’on croirait être au cinéma devant un excellent film sur la quête identitaire adolescente. C’est ainsi que le constat surgit : Skins est bien plus qu’une série télé pour ado. Il y a tellement de style, de subtilité et de talent dans ce show qu’il est impossible de le mélanger au reste des autres productions. Avec cette saison 2, Skins s’inscrit donc comme un chef d’œuvre du genre, avec beaucoup de modestie et de justesse.

Ces jeunes égarés vont entrer à la Fac et s’apprêtent donc à perdre le seul élément structurant de leur vie : leur bande d’amis. C’est alors la fin d’un âge d’or, la perte des repères et le départ d’une vie plus adulte qu’ils craignent plus que jamais quand ils voient où en sont arrivés leurs « vieux ». Il est vraiment triste que l’aventure s’arrête là tant l’attachement à certains personnages a grandi chez la majorité des spectateurs. Pour sa troisième saison, Skins devrait en effet présenter un nouveau casting d’ados avec de toutes nouvelles intrigues. Si le niveau égale le premier volet, il faut s’attendre au meilleur.

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3