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The Outs, critique de la saison 2 de la web série d’Adam Goldman

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Critique de la saison 2 de la web série « The Outs » créé par Adam Goldman. Disponible en VOD sur Vimeo

C’est déjà l’une des plus belles surprises de l’année 2016 : la géniale web série gay The Outs fait son retour avec une deuxième saison en VOD sur Vimeo. Le premier chapitre nous avait tellement emballé qu’on avait revu tous les épisodes une dizaine de fois, finissant par connaître certains répliques par coeur. C’est devenu rare, une série qui fait cet effet. Son créateur et acteur principal, Adam Goldman, a su créer des personnages extrêmement attachants, riches en nuances, tour à tour drôles et émouvants. Une mise en scène intimiste collant parfaitement à un budget modeste, une écriture sensible et piquante à la fois, un casting excellent : on peut sans trop prendre de risques clamer que ,télé et web confondus, avec cette saison 1, The outs s’est imposée comme la meilleure série avec une thématique gay qu’on ait eu l’occasion de voir lors de la décennie écoulée. Pas étonnant que les fans se soient multipliés à travers le monde, fille comme garçons d’ailleurs – le show traitant avant tout de jeunes trentenaires vivant à Brooklyn et se débattant avec leurs problèmes de coeur et leur difficulté à trouver leur place au sein d’une société vaguement ubuesque.

Tandis que la première saison était disponible en accès libre sur le web et avait été financée par le biais du crowd funding, ce second opus bénéficie d’une plus grande exposition, propulsé par Vimeo qui a contribué à sa production et permis à l’équipe de tourner dans des conditions plus confortables. Le spectateur devra payer pour voir ce nouvel ensemble d’épisodes et ça en vaut la peine : on a définitivement besoin d’un auteur comme Adam Goldman et il faut le soutenir !

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La saison 1 suivait la reconstruction de deux garçons, Mitchell (Adam Goldman) et Jack (Hunter Canning) après leur rupture. Au fil des épisodes, les deux personnages se confrontaient, passant par tous les stades de cette étape douloureuse qu’on a tous connu (colère, manque, mise au point, apaisement) tout en tentant de retrouver l’amour. On était curieux de voir ce qu’allait proposer Goldman pour ces 6 nouveaux épisodes, optant pour un nouveau format (chaque épisode dure 30 minutes contre plus ou moins 12 minutes pour la saison 1).

Avec cette nouvelle livraison d’épisodes, The outs évolue. Si l’humour est toujours présent (en particulier lors des scènes avec Oona, meilleure amie de Mitchell, campée par la phénoménale Sasha Winters), l’aspect dramatique prend le pas sur le reste. Il émane de la saison 2 une immense mélancolie, un drôle de sentiment qui retranscrit l’état des personnages dont le quotidien semble constamment inscrit dans un entre-deux. La vie suit son cours mais tout le monde se cherche et se débat pour tenter de trouver son équilibre, si tant est que cela soit possible.

Les querelles ne sont plus qu’un souvenir pour Mitchell et Jack qui sont devenus amis. Mitchell, qui s’était fait salement virer de son poste de journaliste people, se retrouve à travailler pour une application de rencontres et doit s’improviser comme un spécialiste en la matière. Il entretient depuis quelques temps une relation avec un beau chef cuisinier, Rob (Mark Junek) et vit en colocation avec un garçon souvent absent et un poil énigmatique. Jack cultive de son côté une relation longue distance avec Paul dit « Scruffy » (Tommy Heleringer). Ils s’autorisent à « aller voir ailleurs » de temps en temps. Il s’ennuie au bureau, où une atmosphère étouffante règne. Oona est pour sa part devenue une auteur à succès grâce à un livre où elle a condensé ses réflexions les plus bitchy. Sa maison d’édition tente de la transformer en un produit grotesque. Elle couche par ailleurs avec l’un des membres de cette maison d’édition, Kevin (William DeMeritt), un homme qui contrairement aux précédents qu’elle avait pu croiser ne se laisse pas aussi facilement avoir par ses petits jeux d’autodestruction permanents.

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En six épisodes, la série brasse avec brio un nombre impressionnant de thématiques : le couple (avec cette éternelle question de savoir si l’on se sent vraiment bien avec son partenaire, la peur de l’engagement mais aussi paradoxalement de l’abandon et de la solitude), la mort, l’amitié, le monde improbable et déshumanisant du travail (croqué avec beaucoup d’ironie), le caractère tragi-comique d’une société des apparences ultra connectée, le HIV… Tout cela bénéficie d’un traitement d’une rare intelligence, oscillant toujours entre rire et boule au ventre. C’est la plus belle des qualités du show : à l’image de ses protagonistes, elle donne l’impression d’accumuler les vannes et le second degré pour ne pas s’effondrer et céder à un torrent de larmes. Accrocheuse et profonde, The Outs gagne ici davantage en maturité sans perdre de sa créativité et s’impose comme une pépite indépendante indispensable. Quelque chose nous dit qu’on va encore regarder ça une dizaine de fois avant d’espérer en faire le tour… Une troisième saison ne serait pas du luxe.

La saison 1 est toujours disponible en streaming gratuit / La saison 2 en VOD ici

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3