FICTIONS LGBT

VOYEURS (Spiral) de Kurtis David Harder : proies

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Le réalisateur Kurtis David Harder nous plonge en plein cauchemar horrifique avec Voyeurs (Spiral en VO). Par ses thématiques et son atmosphère, le long-métrage évoque une variation à la sauce gay de Rosemary’s Baby. Sombre et dérangeant. 

Années 1980. Malik était un adolescent insouciant, amoureux de son petit copain qu’il embrassait dans une voiture quand une bande d’homophobes leur sont tombés dessus. Une agression homophobe traumatisante qui continue de le hanter plus de 10 ans après. 

Nous le retrouvons adulte, au milieu des années 1990, alors qu’il emménage au sein d’une grande maison dans un village, avec son compagnon Aaron (Ari Cohen) et la fille ado de celui-ci, Kayla (June Laporte). Pendant qu’Aaron fait ses horaires de bureau, Malik travaille à la maison. Il espère devenir écrivain. Nous le suivons en train de mener une enquête sur une obscure personnalité homophobe. 

L’homophobie est très présente tout le long du film. De par l’agression qui a traumatisé Malik, par son enquête mais aussi par son passé avec Aaron, ancien homme marié dont la séparation avec sa femme a été houleuse. On comprend aussi en biais que Kayla, la fille d’Aaron, est souvent la cible de nombreuses curiosités, parfois mal placées, en raison du fait qu’elle ait deux papas. 

Emménageant dans un petit village où tout le monde se connait, Malik et Aaron sont accueillis plus ou moins chaleureusement par leurs voisins, pas habitués à voir des homosexuels. Les voisins d’en face, Marshal (Lochlyn Munro) et Tiffany (Chandra West), semblent plutôt accueillants et bienveillants. Mais au fil des jours, Malik va voir son quotidien basculer dans l’horreur. 

L’impression d’être observé, une entrée par effraction de sa maison et un acte de vandalisme homophobe, un vieillard effrayant qui rode au milieu de la nuit, des animaux morts retrouvés dans le grenier, les voisins d’en face qui ont l’air de se livrer à d’étranges rituels… Progressivement, Malik se persuade que quelque chose cloche et se laisse submerger par la peur. Il essaie d’en parler à Aaron qui ne parvient pas à le comprendre, suspectant que Malik cède à des crises d’angoisse ou de folie en raison des stigmates de son passé. Alors que le quotidien se fait de plus en plus cauchemardesque, la question se pose : Malik est-il vraiment paranoïaque ou lui et son partenaire ont-ils mis les pieds au sein d’une communauté fanatique, maléfique et très dangereuse ?

voyeurs spiral film kurtis david harder
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Ici on est très fan des thrillers et films d’horreur à thématique gay et il est toujours plaisant d’en découvrir un nouveau. Voyeurs ne manque pas de qualités pour les fans du genre : il est plutôt bien interprété (avec notamment dans le rôle principal le beau et intense Jeffrey Bowyer-Chapman), la mise en scène est soignée malgré un petit budget, l’atmosphère est souvent cauchemardesque et oppressante. Le film fait le job, s’amuse à nous faire peur avec quelques jump scares bien placés ainsi que quelques situations dérangeantes. L’intensité monte crescendo, nous faisant petit à petit perdre pied en même temps que le personnage de Malik. Le gore et les effets sanglants sont bien parsemés et les références évidentes à Rosemary’s Baby fonctionnent bien. 

Outre la bonne tenue de l’ensemble, ce film d’horreur a pour originalité d’avoir un couple gay comme personnages principaux et de proposer une réflexion assez poussée sur les traumatismes liés à l’homophobie mais aussi à quel point les minorités peuvent être pour des êtres dangereux des proies faciles. Dans homophobie il y a « phobie » et la peur de la différence poussent certains esprits étroits à se méfier ou à ne pas croire ceux qui tentent d’établir une vérité. Ce point va se révéler assez central dans la dernière partie du métrage. 

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Mêlant ostracisme, fanatisme avec une petite touche de fantastique, Kurtis David Harder nous balade entre parano et cauchemar et ne manque pas de nous faire frissonner. Si parfois certains effets peuvent paraître un peu appuyés et que Voyeurs ne finira pas au panthéon du cinéma d’horreur, il constitue une proposition originale et plutôt bien vue pour le genre qui mérite bien un visionnage. 

Film produit en 2020 et disponible sur la plateforme de Films LGBT Queerscreen 

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Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3