COURTS

WE ONCE WERE TIDE de Jason Bradbury : la moitié perdue

By  | 

We once were tide de Jason Bradbury est un court-métrage gay sentimental et intimiste de moins de 20 minutes sorti en 2011 dont l’épure des dialogues et la modestie du scénario font mouche. Plus de 17 millions de vues au compteur sur Youtube.

Attention, spoilers (voir le film en fin de billet)

L’action se situe sur l’île de Wight. Décors naturels d’une incroyable mélancolie, d’une beauté et d’une poésie à couper le souffle en même temps que le tout inspire un étrange désespoir. Un beau garçon guette à la fenêtre. Son ami de toujours, Kyle, vient lui rendre visite. Sans avoir recours aux mots, le réalisateur parvient à donner en à peine quelques plans une consistance, un passé riche en émotions à ces deux garçons. Ils s’aiment, ils n’ont probablement connu personne d’autre dans leur coin isolé. Chaque moment passé ensemble est un événement en soi, un effet magique qui redonne à la vie tout son souffle. Ces deux-là, l’un à côté de l’autre, forment une évidence. Un amour fort et nécessaire pour le jeune personnage principal, Anthony, qui doit au quotidien s’occuper de sa mère gravement malade qui ne se souvient plus de lui.

Avec Kyle, c’est l’échappée sauvage. Le vent dans les cheveux se fait plaisant, les regards et les frôlements suffisent. Le rapport entre les deux garçons est brut, d’une pureté désarmante. La scène d’intimité durant laquelle ils se mélangent donnent le frisson tant elle est harmonieuse. Mais Kyle passe son temps à photographier Anthony, comme pour le capturer. Anthony apprendra sur la fin que son seul ami, son unique compagnon de rêveries, a été admis dans une école et qu’il est sur le point de partir. Il sera condamné à rester seul, il ne se ment pas à lui-même : plus rien ne sera jamais plus comme avant.

Sans jamais jouer au petit malin, malgré une maîtrise formelle qui s’impose d’elle-même, Jason Bradbury nous rappelle le goût terrible des paradis perdus. On ressort de We once were tide les yeux mouillés, avec l’envie d’un gros câlin. La chaleureuse tristesse qui en émane est de celles qui ne lâchent pas le spectateur de si tôt.

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3