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WE THE ANIMALS de Jeremiah Zagar : cri d’enfant

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C’est un récit d’enfance pas comme les autres que propose le réalisateur Jeremiah Zagar avec We the animals, adaptation de l’oeuvre de Justin Torres. On y suit une fratrie de trois jeunes garçons issus de l’union d’une mère américaine et d’un père portoricain. Blessures indélébiles, traumas et échappées oniriques au menu.

Le film restitue joliment la beauté, l’énergie et la magie de l’enfance. La soif de découvrir le monde, la vie. Manny, Joel et Jonah ont cet âge où tout peut encore facilement devenir possible. Mais il y a un grand bémol : leur famille est de plus en plus fragilisée par des parents en roue libre. La mère flirte avec la dépression et subit les crises violentes de son mari. Le père pète en effet régulièrement les plombs, fait des dégats et disparait. Les trois frères sont alors livrés à eux-mêmes, confrontés à la violence du monde.

we the animals film

Entre douceur et violence contenue, le métrage matérialise cette sensation déchirante dont peut-être submergé un enfant quand son regard ne peut se détourner de drames adultes. Quand on n’est pas protégé par ses parents, on peut alors facilement basculer dans l’errance ou la délinquance.

Si l’ensemble aurait pu se contenter d’être un joli petit drame familial et social avec un sous-texte politique assez subtil (on pense évidemment à certains discours de Trump et le titre du film est un joli pied de nez à certaines déclarations de ce dernier) il est beaucoup plus que ça grâce à sa mise en scène.

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We the animals se rapproche de plus en plus du regard de l’un des membres de la fratrie, Jonah. Plus sensible que ses autres frères, il matérialise ses émotions via des dessins qui s’animent à l’écran. L’art, la poésie, les couleurs, contre les drames et les peurs d’une enfance arrachée. La réalisation aérienne et presque fantastique transcende ce récit universel et souvent déchirant. Et on a la boule au ventre pour Jonah, petit gars qui découvre doucement son attirance pour les garçons et qui doit à la fois composer avec l’inquiétude d’être différent et un contexte familial lourd.

Servi par de très bons acteurs aussi bien parmi les enfants que les parents (on retrouve Raùl Castillo de la série « Looking » dans un rôle très différent), un film en forme de poème et de cri d’enfant qui fait mouche.

Film présenté au Festival Chéries Chéris 2018 // Sortie en salles le 6 février 2019

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3