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Daughn Gibson, Me Moan : mordre la poussière
Il n’aura pas fallu attendre plus d’une année pour avoir des nouvelles de Daughn Gibson, révélation musicale majeure de 2012. Signé chez Sub Pop, l’ex routier viril et sexy qu’on aurait adoré voir dans un film de la Working Man Trilogy de Joe Gage, nous propose avec son second opus Me moan un nouveau voyage des plus excitants. Ne pas se fier à la croix qui orne la pochette (en y regardant bien cette dernière est d’ailleurs plutôt amusante): le chanteur à la voix grave troublante délivre ici un ensemble de morceaux qui transpirent la luxure. Les fans de la première heure pourront être déroutés : l’artiste opère ici un certain changement de registre. Les ballades fantomatiques et minimalistes ont cédé la place à des titres plus solides, plus rentre-dedans. En témoigne l’ouverture The sound of law, jolie bizarrerie qui nous perd complètement à travers divers genres musicaux, laissant déjà les guitares s’affirmer nettement plus qu’auparavant.
La force de Daughn Gibson tient dans sa capacité à toujours nous emmener dans un espace temps flou. Impossible de dater les pistes qui se succèdent, de les rattacher précisément à un genre, un courant. Il confronte les opposés avec une assurance souvent jouissive et payante (parmi les plus belles réussites citons Mad Ocean, Won’t you climb ou Into the sea). Si les ballades évoquant non sans romantisme une certaine Amérique où la vie serait un western permanent, Gibson se plaît aussi et surtout à nous mettre le feu au corps. Outre le réjouissant, décalé et lubrique Kissin on the Blacktop (dont le clip pue le sexe à des kilomètres), le beau gosse crooner nous emmène vers l’orgasme avec le physique et aventureux You don’t fade. Le joyau de ce second album est pourtant plus sensuel que direct : Phantom Rider tire le meilleur de la voix érotiquement chargée de son auteur, nous plongeant au cœur d’une virée nocturne où les corps se mêlent aux esprits. A la fois brutal et sensible, Daughn Gibson ne manque pas de nous faire gémir de plaisir.