FICTIONS LGBT
LEAVE BLANK de Todd Verow : deux hommes perdus
Todd (Todd Verow) engage un prostitué dont le sourire l’a charmé, Paul (Gregg Tucker), pour passer un week end avec lui à New York. Il lui offre 2000 dollars. Après avoir fixé l’arrangement, les deux hommes se retrouvent dans une chambre d’hôtel et se sautent rapidement dessus. Leur rapport sera intense et dangereux, Todd demandant à ce que la sodomie se fasse sans préservatif (précisons qu’à ce moment-là la Prep n’existait pas). Après ces premières étreintes où les deux hommes ont pris leur pied en se filmant l’un et l’autre partiellement, ils discutent, s’allongent, mangent. Se dessine alors le portrait de deux solitudes. Amours déchus, incapacité d’entretenir une relation saine, espoirs partis en fumée : chacun se confie et trouve en l’autre un écho inattendu.
Le temps d’un week end, Todd veut un peu tester tout ce qu’il s’était interdit. Outre le sexe bareback, il prend de la drogue et entraîne Paul dans une mini-orgie plutôt hard. Mais alors que la complicité devient bien réelle, que la fin de leur long rendez-vous approche, le client prend une décision inattendue…
Adepte d’un cinéma sans moyen et à la liberté de ton absolue, Todd Verow livre avec Leave Blank un film intimiste, à la fois sentimental et trash, comme lui seul en a le secret. Tout sonne juste, semble vrai et les fêlures des deux personnages (l’un qui est passé à côté de sa vie et l’autre qui est bien parti pour suivre le même chemin) sont d’autant plus glaçantes. Le spectateur est en position de voyeur, observant souvent en temps réel la relation naissante entre Todd et Paul. Et comme dans la vie de tous les jours, le sexe n’est pas censuré, les choses se figent parfois, le silence et les maladresses sont de mise. Et comme dans la vraie vie, s’il y a de la beauté, il y a aussi de la crasse, des choses difficilement avouables « en société ».
Si le film relève plus de l’exercice de style qu’autre chose, que la fin est un peu trop dramatique, Leave Blank a le mérite de dresser deux portraits forts d’hommes perdus entre souvenirs tristes ou joyeux, amertume et envie plus ou moins grande de croire encore en l’avenir. Comme d’habitude chez Verow, voici une expérience de cinéma à part et à la sensibilité exacerbée.
Film sorti en import DVD en octobre 2011