FICTIONS LGBT
BOYS de Mischa Kamp : ligne et désirs
Pays-Bas. Sieger (Gijs Blom), 15 ans, s’entraîne pour les championnats d’athlétisme en compagnie de son meilleur ami Stef (Stijn Taverne). Depuis la mort de sa mère, il vit seul avec son père et son frère Eddy (Jonas Smulders). Ce dernier traverse une phase de rébellion : il ne va plus travailler et traîne dehors où il semble se fourrer dans des combines un peu louches. De quoi susciter de petites tensions au cœur d’un noyau familial fragile.
Mais Sieger est un peu ailleurs : outre la concentration que requiert son entraînement, il est troublé par ses premiers désirs. Tandis que son ami Stef court après les filles et l’incite à en faire de même, le garçon se révèle hésitant. Il est davantage attiré par Marc (Ko Zandvliet), un autre jeune sportif qu’il a croisé sur la piste d’athlétisme. Se tournant autour, les deux garçons finissent par entamer une liaison chaste et secrète. Si Marc assume et vit pleinement ce qu’il considère comme un début de relation, Sieger a plus de mal…
Des premiers émois adolescents gays, le milieu du sport… : le pitch de Boys (Jongens en VO) en rappelle beaucoup d’autres. Le long-métrage de Mischa Kamp, dispose d’un scénario classique et sans grandes surprises. Pourtant, force est de constater qu’on ne s’ennuie pas une seconde, bien au contraire. Outre la beauté plastique des jeunes interprètes (filmés avec beaucoup d’envie, sublimés) et une certaine fétichisation de leurs activités sportives (on s’attarde volontiers sur leurs petits shorts et non sans humour sur les positions ambiguës qui se multiplient lors de l’entraînement), c’est bien la mise en scène qui aide ce projet modeste à séduire malgré son manque d’audace scénaristique.
Il émane de Boys quelque chose de très doux. C’est une chronique adolescente en milieu rural qui nous replonge avec délice dans ces après-midis à faire du vélo dans la forêt, qui nous propose de revivre l’excitation et la peur d’une belle rencontre, d’un premier amour. La gêne, l’intensité, les doutes sur son identité… La piste d’athlétisme est hautement symbolique pour le jeune héros : sa grande question est de savoir s’il se sent prêt à quitter la ligne droite de la normalité pour s’accepter et vivre ce que lui dicte son cœur. Il se pose trop de questions, il a un peu trop peur alors que Marc fonce tête baissée…
Les échanges entre les deux garçons sont extrêmement mignons, on plonge dans cette petite bulle non dénuée d’envolées joliment naïves, on se surprend à vibrer au rythme d’une histoire qui ne date pourtant pas d’hier. C’est que Mischa Kamp raconte sans doute là une histoire personnelle, dont les petits détails, la précision, la délicatesse, font la différence. Il analyse avec finesse et drôlerie la mécanique de la bande et la danse hésitante du désir, il dépeint avec sensibilité et pudeur le quotidien d’une famille qui tente de rester soudée après un deuil. De quoi rendre ce Boys sans prétention on ne peut plus attachant.
Film sorti en 2015. Disponible en DVD et sur la plateforme de Films LGBT Queerscreen