FICTIONS LGBT
LE 24ÈME JOUR de Tony Piccirillo : un goujat en otage
Un soir dans un bar, Tom (Scott Speedman) accoste Dan (James Marsden). Ce dernier était de sortie avec une amie mais se laisse vite subjuguer par le charme de ce bel inconnu. Ils rentrent ensemble chez Tom, se cherchent, flirtent…Mais progressivement Tom devient un peu bizarre, questionne avec insistance Dan sur ses relations passées, son nombre de conquêtes, s’il utilise toujours une capote ou non… D’abord séduit, Dan finit par se demander si Tom n’est pas un peu dérangé. Et curieusement son appartement lui rappelle quelque chose…
Et voilà que notre ami découvre qu’il avait déjà été chez Tom il y a cinq ans et qu’ils avaient déjà couché ensemble ! De quoi le faire passer pour un abruti de première alors que quelques minutes auparavant il jouait les romantiques n’ayant eu que 6 ou 7 conquêtes dans sa vie. Mal à l’aise, il finit par décider de s’en aller. Mais Tom l’enferme, l’attache, et compte bien remettre les pendules à l’heure. Car non seulement Dan est un goujat mais il se pourrait qu’il ait transmis sans le savoir à Tom le virus du VIH…
Scott Speedman et James Marsden, acteurs révélés par des séries adolescentes et des productions hollywoodiennes plus ou moins digestes, réunis dans un gay themed movie aux airs de thriller :Le 24ème jour intrigue d’emblée. Les deux garçons seront d’ailleurs l’atout majeur de cette production indé adaptée d’une pièce de Tony Piccirillo et optant pour un huis clos des plus étouffants. Scott Speedman est particulièrement surprenant dans son incarnation d’un jeune homme profondément ambigu, aussi blessé, sensible, qu’au bord de la folie et capable d’un certain sadisme.
C’est bien connu : entre eux, les garçons peuvent vite se permettre de nombreuses passades, des plans sans importance juste pour le plaisir. Mais certains coups d’un soir peuvent coûter cher…Nombreux sont les retournements de situation contribuant à nous amener à changer de point de vue sur les deux personnages exposés. D’abord très charmant et attachant, Tom devient flippant et assez repoussant de par sa névrose. Séduisant et pas prise de tête, Dan se révèle quant à lui assez monstrueux de par sa propension à mentir l’air de rien sur à peu près tout, histoire de sauver sa peau et de continuer de mener tranquillement sa petite vie égoïste.
Qu’on se le dise : Dan c’est un peu le prototype du salaud qui vous laisse miroiter un joli début de relation alors qu’il n’en veut qu’à votre derrière. Il y a donc presque pour le spectateur quelque chose de jouissif à voir ce genre de mec incapable de bouger, bien obligé de se confronter à ses petits mensonges et actes malhonnêtes. Mais forcément, Tom finit par aller un peu trop loin et on le plaindrait presque. On entretient donc un rapport plutôt complexe d’attachement/répulsion face aux deux protagonistes.
La qualité de l’écriture de l’œuvre est indéniable et il faut bien admettre que le huis clos étouffe. Peut-être un peu trop d’ailleurs. Tom tourne constamment autour du pot, peine à révéler pourquoi il a pris en otage Dan, ce qu’il attend de lui. Le temps ne passe pas vite, parfois la tension redescend et quelques passages fatiguent. Tony Piccirillo ne peut en effet pas s’empêcher de jouer avec nos nerfs, nous dévoilant des bribes de flashbacks au compte goutte (des flashbacks un peu laids, filmés avec les pieds avec un filtre bleu pour bien montrer qu’il s’agit du passé desfois qu’on serait trop bêtes pour ne pas le remarquer).
Si le projet peine à captiver du début à la fin, il pose néanmoins des questions, expose des thèmes non dénués d’intérêt. Comme la responsabilité de chacun à avoir des rapports sexuels « safe », le sentiment de haine/culpabilité que peut ressentir un jeune homme qui se retrouve avec le VIH. Vengeance ou rédemption , colère ou compréhension ? Le 24èmejour n’est pas évident, pas forcément aimable mais évoque de façon plutôt audacieuse un sujet sous-exploité dans le cinéma du début des années 2000.
Film sorti en DVD en 2008