CINEMA
LES FÉLINS de René Clément : pris au piège
Marc (Alain Delon) est un joli garçon et il le sait. Parmi ses nombreuses maitresses, il y a la femme d’un dangereux gangster. Ce dernier découvre la liaison et demande l’execution de Marc. Dès lors, le bellâtre est en cavale. Après une furieuse course poursuite, il se réfugie dans un étrange asile. C’est là qu’il rencontre Barbara (Lola Albright) et sa bonne Melinda (Jane Fonda). Barbara a hérité de la fortune de son mari milliardaire mystérieusement disparu. Elle engage Marc comme chauffeur.
Le fugitif est surpris de découvrir que personne ne travaille dans la maison, que son employeur compte son argent…Il finit aussi par découvrir que Melinda n’est pas la bonne mais la cousine de Barbara. Y aurait-il d’autres secrets à dénicher ? La maitresse de maison cacherait un ancien amant quelque part…et elle semble avoir établi un plan machiavélique. Pendant ce te temps, Melinda fait la cour à Marc avec insistance. Mais ce dernier ne pense qu’à une chose : fuir, partir loin du coin où des hommes le recherchent encore pour avoir sa peau. Mais il se pourrait bien qu’il soit pris dans les filets de ces deux blondes manipulatrices…
Les félins est un film qui s’amuse à nous mener en bateau. Comme Marc, on découvre les évènements avec stupéfaction et on sait de moins en moins à quoi ou qui on peut se raccrocher. Les premières scènes sont haletantes et extrêmement ludiques : les hommes du gangster suivent Marc en voiture puis à travers la ville. René Clément s’éclate à mettre tout cela en scène, faisant parfois de son personnage principal un superhéros ou un grand chanceux. La tension, le spectaculaire, se mêlent à un humour irrésistible. Puis vient la rencontre avec les deux blondes, Barbara et Melinda.
Nouvelle vie, nouveau décor, les grands espaces, le bruit et les pièges de la ville laissent la place à une sorte de vie en huis clos. Marc se plait à chercher des noises à la très guindée Barbara, écoute un peu aux portes et comprend vite que cette dernière cache un secret. Melinda, elle, parait inoffensive, naïve. Mais si elle était une enfant, elle serait une enfant diabolique. Car à la moindre colère, elle ne peut s’empêcher de manipuler ou de mettre la vie des siens en danger. Une vraie ingénue fatale ?
Impossible de passer à côté de la brillante écriture du scénario (une adaptation de l’œuvre de Day Keene) : les dialogues étant aussi charmants que mordants. Et la mise en scène est tout à fait à la hauteur : Alain Delon comme Jane Fonda sont totalement magnifiés (il faut dire qu’ils étaient tous les deux de véritables bombes) , de vrais moments de grâce leur sont offert et ils ont l’air de s’éclater avec des partitions opposées ; mais il y aussi tous ces jeux de miroir, une grande fluidité dans les mouvements de caméra. Tout va vite, tout s’enchaine sans qu’on parvienne à bien tout comprendre. On a cette sensation d’assister à une œuvre imprévisible et c’est assez jouissif.
Plein de surprises, de rebondissements, Les Félins se révèle au final être une œuvre délicieusement « bitchy », faisant de l’homme le sexe faible. Les hommes seraient des félins, des chats que l’on enferme, qui tiennent compagnie et qu’on engraisse…On ressort de cette histoire de manipulation particulièrement habile avec le sourire aux lèvres.
Film sorti en 1963 et disponible en VOD