COURTS
HEARTBREAK de August Aabo : le couple, image d’Epinal
Ce court-métrage danois signé du réalisateur August Aabo nous embarque dans une histoire d’amour pour le moins particulière. Entre portrait de couple au vitriol, thriller et humour très noir, un film original qui ne laisse pas indifférent.
Sixten ( Adam Ild Rohweder ) est en couple depuis des années avec son copain Albert ( Anton Hjejle ). Aujourd’hui c’est le grand jour : ils vont se marier ! Mais avant de se promettre d’être ensemble pour l’éternité, il y a possiblement quelque chose à régler. Derrière les sourires de façade, les deux hommes se querellent souvent et dernièrement de plus en plus. Albert tape sur le système de Sixten par son incapacité à faire des choix, à se satisfaire de la routine et en ayant une personnalité de plus en plus effacée. Cela agace tellement Sixten qu’il pourrait parfois avoir envie de le tuer. Littéralement. Et c’est là que ce court-métrage surprend.
Dès la scène d’introduction nous présentant le couple dans une mise en scène kitsch et onirique, trop belle pour être vraie, le rêve semble pouvoir tourner au cauchemar : on voit Sixten hésitant à étouffer son partenaire endormi avec un coussin ! Sixten est-il à bout de nerf au point de vouloir en finir avec son partenaire ? Pourquoi ne parvient-il pas à ce stade à simplement s’en séparer plutôt que de l’épouser ? Quel rôle a véritablement Albert dans tout ça ?
Le spectateur se laisse porter, ne sachant pas du tout où il a mis les pieds alors que l’ensemble semble lorgner de plus en plus vers le thriller. Jouant avec les différents genres et les multiples visages et aspects que peut avoir une relation de couple, Heartbreak séduit par son ton singulier, sa folie et son regard pour le moins acéré sur la vie de couple.
Outre la thématique de la folie, le film est une variation déjantée sur le bonheur de façade des couples. N’aviez-vous jamais remarqué ? Quand les gens sont en couple, ils sourient toujours, vous disent que tout va bien, relativisent les mauvaises passes et situations. Et quand ils rompent vous apprenez alors tout ce qui se cachait de négatif, d’insupportable voire de sordide derrière l’image sociale renvoyée. Car quand on est dans une relation, on veut faire croire que tout va bien, qu’on a de la chance, que ça vaut le coup. Pour le regard des autres et / ou ne serait-ce que pour se rassurer soi-même. La comédie sociale cache pourtant souvent beaucoup plus de zones d’ombres et d’ambiguïtés qu’ici le réalisateur August Aabo matérialise de façon extrême et jusqu’au boutiste, avec un style affirmé.
Film produit en 2023 et présenté au Festival Chéries Chéris 2024 / Présenté dans la section « Courts Gays 3 » programmée le Lundi 25 novembre à 10h05 au MK2 Beaubourg
