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Aladdin, We were strong so we got lost : rupture prolifique
Un été à Paris. Nicolas Ker (chanteur de Poni Hoax) et Gilbert Cohen (alias Gilb’r du label Versatile) ont tous les deux dû faire face à une rupture. Ils composent alors ensemble un album inédit, alliant les forces de l’un et de l’autre. Et voici We were strong, so we got lost, disque surprenant et hors temps, à la fois triste, malicieux, et insolent. La presse comme les internautes en sont rapidement tombé amoureux et pour cause : c’est ce que l’on appelle une belle surprise, des morceaux finement produits qui prennent aux tripes alors qu’on tendait l’oreille sans trop y croire.
Ca commence très fort avec Oh Oriane. Comme le premier cri après une rupture, un grand moment de désespoir qui atteint des sommets de beauté avec la voix grave de Nicolas Ker. Les petites touches éléctro donnent l’illusion d’un envol alors qu’il s’agit bien ici d’un véritable crash. Un titre presque trop court, qu’on a envie de se repasser encore et encore, d’une sensibilité et d’une sincérité qui laissent pantois. Alors qu’on pouvait s’attendre à un voyage au fond de la dépression, le deuxième morceau rectifie directement le tir : K-maro comme son nom pouvait le laisser présager est une ballade un tantinet nostalgique (et surtout bien second degrés) qui fait de K-maro l’icône déchue d’une génération. Il fallait oser rendre hommage à l’auteur de « Femme like u ». C’est fait avec classe, façon crooner désenchanté. Surprenant. La beauté peut-être partout.
Quand le duo évoque une Mass Confusion, il fait péter les beats electro et nous entraîne dans une sorte de partouze sonore bien lubrique où la consternation, les feux de l’enfer, se mêlent à une envie de tout envoyer bouler avec quelques pas de danse. Nicolas Ker joue avec son organe vocal, s’aventure dans des registres très différents et garde toujours l’équilibre. Rock indé stylé (The sun is on fire ; The secret life of animals), ballade aux claviers mélancoliques qu’on jurerait prêts à rendre l’âme (Come to the fair) , passage new wave embrumé (Key to fort knox) , envolée légèrement psyché (Little girl did lay). Plein de fêlures, les deux hommes témoignent d’une créativité sans limite et osent tout. From Blindless to sight est de ces titres qui vous donnent des envies de déchéance totale tandis que Suicide Groove rendrait ludique n’importe quelle tentative de quitter ce bas monde.
Véritables montagnes russes, où chaque piste réserve son lot d’obsessions et de facéties, We were strong so we got lost est un vrai coup de génie.