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ALL THE WAYS OF GOD de Gemma Ferraté : un nouveau Judas

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Avec son héros nommé Judas, la réalisatrice Gemma Ferraté transpose dans notre monde moderne un célèbre personnage biblique avec All the ways of God (Tots els camins de Déu en VO). Une expérience de cinéma mystique et très exigeante qui ne s’adresse pas à tous… 

Judas (Marc Garcia Coté) erre sur une plage déserte, dévasté après avoir trahi son ami le plus proche. Rongé par les remords et le chagrin qui vont avec cette trahison il décide de partir à l’aventure pour fuir la réalité. 

Il se retrouve seul dans la nature et a bien du mal à reprendre ses esprits. C’est alors que surgit de nulle part Iu (Oriol Pla), un beau jeune homme un peu sauvage lui aussi. Progressivement, les deux inconnus s’apprivoisent et sans trop passer par les mots se comprennent. Iu va permettre à Judas de se confronter à ses démons et peut-être, qui sait, accéder à la rédemption… 

L’idée de départ de délivrer une variation moderne autour de la figure de Judas est intéressante et originale, d’autant plus que la réalisatrice Gemma Ferraté va beaucoup jouer tout le film durant sur le magnétisme charnel de son personnage principal et du bel inconnu qui croise son chemin. All the ways of God n’est pas dénué de qualités : la mise en scène et la photographie sont assez belles, soignées. Impossible de ne pas mentionner évidemment le charme des deux acteurs Marc Garcia Coté et Oriol Pla qui, malgré le peu de matière qu’ils ont, composent avec une certaine finesse des protagonistes complexes et mystérieux. 

Le soucis ici, c’est le dispositif de l’oeuvre. Elle ne dure que 66 minutes mais parait en durer 4. Des minutes entières s’écoulent sans qu’il n’y ait la moindre action ou le moindre mot échangé. Pourquoi pas : certain(e)s cinéastes délivrent de très belles oeuvres atmosphériques et/ou contemplatives avec une certaine économie de mots. Mais ici ça ne marche qu’à moitié voire pas du tout et c’est sans doute lié au fait que le projet est très peu ou pas écrit. Les deux comédiens ont l’air d’être bons mais de n’avoir vraiment pas grand chose à se mettre sous la dent et à jouer. Les dialogues sont réduits au strict minimum. A trop vouloir jouer la carte de l’abstraction et de l’émotion intériorisée la réalisatrice accouche d’un long-métrage dont le manque d’enjeu(x) se révèle fatal. 

Je l’avoue, à titre tout personnel, je me suis vraiment beaucoup ennuyé lors du visionnage. Et pourtant je suis le premier à adorer des films de Terrence Malick par exemple. Comme l’impression d’assister à un beau gâchis car les acteurs ont à l’évidence du potentiel, le décor naturel avait tout pour être hypnotique et Gemma Ferraté réussit souvent de beaux plans. Mais quand absolument aucune émotion ne s’esquisse et qu’on a l’impression qu’il ne se passe jamais rien à l’écran, c’est que quelque chose cloche.

A moins d’être très patient ou d’être un grand amateur de la Bible, méfiance : votre vision du film pourrait s’avérer (très) pénible. 

Film produit en 2014 et disponible sur la plateforme de Films LGBT Queerscreen 

Blog rédigé en solo par Gaspard Granaud. Avec la précieuse aide de Pierre pour la période avril-mai 2022, merci <3