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Arlt, Feu la figure : quand la chanson française tremble
Après un premier album réjouissant, Arlt est de retour. Et cette fois, ils sont officiellement trois : Sing Sing, Eloïse et Mocke (qui s’offre une nouvelle aventure en dehors d’Holden). Voici donc leur deuxième bébé, intitulé Feu la figure. Il est rare que j’achète un album à l’aveugle, d’autant plus quand il s’agit de chanson française. J’avais confiance. Il faut dire que le premier single issu de ce nouvel effort, Le Pistolet, m’avait plus que mis l’eau à la bouche (c’est le cas de le dire). On retrouve la liberté de Mocke à la guitare, qui associée aux voix de Sing Sing et Eloïse, nous entraîne dans une véritable transe tandis que les paroles mystérieuses finissent petit à petit par se révéler pour le moins coquines…
Arlt fait de la chanson française mais pas comme on la connaît. Ils font une musique comme on en entend peu aujourd’hui. Tout ici est beau et poétique, intrigant. On est jamais bien certain de comprendre le sens, la teneur des paroles, mais qu’importe : une voix nous réchauffe, nous émeut, pendant que les guitares nous font chavirer. L’écoute a quelque chose de physique. On ressent toutes ces paroles même si la plupart du temps elles nous échappent. On s’accroche, on s’arrête sur des mots. Et ça fait du bien à l’esprit : on rêve.
« Sans mes bras » nous cajole, Une sauterelle…sautille alors que les voix se succèdent, se chevauchent en évoquant le désir. Si la voix d’Eloïse est toujours aussi envoûtante, les guitares contribuent beaucoup à apporter à ce disque unique une atmosphère fantomatique. On ne pouvait pas rêver mieux que la contribution de Mocke à cette délicate entreprise. Son arme musicale en main, il n’en finit plus de dessiner des horizons sonores obsédants (Tu m’as encore crevé un cheval). Le ventre de la baleine se déploie, entête, inquiète un peu sur la durée. Comme dans un rêve, avec Arlt, la vie est plus belle mais aussi parfois plus menaçante. Ces morceaux travaillent l’inconscient. On y revient, on a la sensation à chaque fois d’y trouver de nouvelles choses. Et même si on devine que bien des fantômes, des esprits, ont influencé ces artistes érudits, ils nous laissent la place nécessaire pour prendre nos marques, colorier avec eux des histoires, des paysages aux allures d’infini. Et on tremble. Comme ils le disent dans Une sauterelle (Dessinée par un fou) : « Ca tremble et tout ce qui tremble est vrai ».
A lire : Arlt revient sur chaque morceau dans un excellent billet mis en ligne par Pinkushion