COURTS
COEURS PERDUS de Frédéric Lavigne : rencontre et perte
Pour son premier court-métrage en tant que réalisateur Frédéric Lavigne frappe fort et en plein coeur avec l’hyper sensible Coeurs perdus.
Paris, 1992. Julien ( Guillaume Soubeyran ) est étudiant en thèse scientifique. Bisexuel qui ne s’assume pas trop, il se connecte de temps en temps sur une ligne de télephone gay pour faire des rencontres anonymes. C’est par ce biais qu’il rencontre Christophe ( Isaak Dessaux ) , un garçon de son âge qui est un peu tout son contraire. Julien est taciturne, discret, parle peu, intériorise voire refoule ses sentiments, s’habille avec des petits T-shirts vintage. Christophe, qui est coiffeur, est un gay affirmé, pouvant paraître extravagant de prime abord, extraverti, au look queer. Les opposés s’attirent et leur première rencontre provoque d’emblée des étincelles : Julien est maladroit et pas très à l’aise mais Christophe avec sa gentillesse et sa spontanéité va rapidement prendre les devants. Les semaines et mois qui suivent, ils vont vivre une liaison en dents de scie : alors que Christophe s’attache, Julien reste fuyant, inaccessible, peu démonstratif. On comprend qu’il ressent des choses mais bloque, n’assume pas totalement. Et voilà qu’un jour il apprend une nouvelle qui va le chambouler à jamais…
Il y a des films qui ont cette petite magie rare qui fait que dès les premières scènes vous savez que vous aller adorer ce que vous allez voir. Coeurs perdus à cette magie-là. Tout sonne juste dans ce court-métrage hautement mélancolique extrêmement prometteur. Evidemment, le réalisateur Frédéric Lavigne ne s’est pas trompé en choisissant dans le premier rôle l’ultra craquant Guillaume Soubeyran qui explose ici à l’écran avec son jeu d’une rare justesse et sensibilité, d’une retenue souvent déchirante. On s’attache d’emblée à son personnage, on en tombe un peu amoureux aussi… et on va pour le coup bien ressentir la douleur et la frustration de celui qui est en face de lui, le garçon queer et « coeur d’artichaud » Christophe (campé par l’influenceur Isaak Dessaux, qui étonne ici avec une belle composition, elle aussi pleine de sensibilité).
L’histoire de cette rencontre au début des années 1990 a un parfum entêtant de paradis perdu. Outre la grande justesse de l’interprétation, Coeurs perdus nous attrape par son atmosphère désenchantée, sa photographie soignée, son côté à vif. On en ressort avec les frissons.
Film produit en 2024 et présenté au Festival Chéries Chéris 2024