FICTIONS LGBT
CUPCAKES de Eytan Fox : s’affirmer en chantant
Tel Aviv. Chaque année, Anat (Anat Waxman), pâtissière spécialisée dans les cupcakes, Keren (Keren Berger), blogueuse spirituelle, Efrat (Efrat Dor), chanteuse indépendante, Dana (Dana Ivgy), assistante de la Ministre de la Culture, Yael (Yael Bar-Zohar), ex mannequin tentant sa reconversion dans le monde de la communication et Ofer (Ofer Shecter), encadrant pour enfants, se réunissent devant l’Universong. Un concours de chant, kitsch et populaire, où tous les pays s’affrontent pour remporter le titre de champion. Une émission qui permet à ces voisins et amis de se retrouver, de rire et parler, tout en mangeant de délicieux cupcakes.
Sauf que cette année, le rituel n’est pas à la hauteur des espérances : le candidat choisi pour représenter Israël fait un bide et la bonne humeur est absente de la réunion. Et pour cause : Anat, qui a invité tout le monde chez elle, va mal. Son mari vient de lui annoncer qu’il partait plusieurs mois en Thaïlande afin de prendre ses distances, faire le point sur leur couple. Pour lui remonter le moral, ses convives improvisent une chanson optimiste.
Entretenant une relation avec un présentateur tv dans le placard, Ofer est surpris quand celui-ci entend leur chanson et trouve qu’elle serait assez bonne pour être soumise aux sélections de l’Universong. Sans consulter ses copines, Ofer envoie le titre et quelques mois plus tard une surprise de taille les attend : ils ont été retenu pour représenter leur pays au prochain concours !
Si Ofer est ravi, la nouvelle perturbe ses voisines qui ne sont pas certaines de vouloir être exposées au grand public et de prendre le risque d’envoyer valser leur quotidien pour chanter. Malgré la peur et les doutes, un groupe va tout de même se former pour une aventure humaine exceptionnelle. Entre rêve éveillé et pièges, chacun tirera des leçons de cette année singulière.
S’il est avant tout connu pour ses portraits intimistes et autres mélodrames, le réalisateur Eytan Fox a toujours distillé au fil de ses films son amour pour la chanson permettant souvent à ses protagonistes de s’oublier, s’évader et de renforcer les liens humains. Cupcakes est sa première comédie et elle reprend toutes les thématiques d’une œuvre humaniste, généreuse, ouverte au plus grand nombre.
Ce n’est pas un hasard si l’on croise des petits clins d’oeil à des films de Jacques Demy au beau milieu du métrage : Eytan Fox nous propose un film ultra coloré, sucré, qui n’a pas peur de flirter avec le kitsch. Sauf que contrairement à Demy, le cinéaste n’inclut ici pas en arrière-plan des choses dramatiques. Cupcakes est un pur feel good movie, embarquant le spectateur pour un p moment de fantaisie, avec tout un tas de chansons sirupeuses et cultes.
Les personnages sont très stéréotypés, le scénario souvent cousu de fil blanc (les clichés sur le monde de la télévision et de la musique, la vision très carte postale de Paris…) mais qu’importe : il émane de l’ensemble une folle énergie, un plaisir des comédiens d’être ensemble palpable à chaque plan. Cupcakes est une invitation à réaliser ses rêves, à s’autoriser à sortir de sa zone de confort pour se redécouvrir et se dépasser, écouter son cœur plutôt que de prêter importance aux médisances. Chaque personnage va traverser une remise en question, réaliser ses erreurs, ses blocages, pour mieux les dompter, se libérer. Comme une chanson pop sentimentale, l’intrigue tire le meilleur d’un certain sentimentalisme pour fédérer, célébrer l’amour, l’amitié, la fraternité.
Ofer et ses copines devront faire face à un certain nombre d’embûches, de personnes désireuses de changer leur personnalité, les empêcher d’être eux-mêmes. Apprenant à se respecter, refusant de se laisser enfermer dans des cases, de se conformer, ils vont faire bloc en chantant avec un plaisir d’une pureté enfantine. On appréciera, entre autre choses, le traitement très doux du personnage de Ofer, bien dans ses pompes et solaire, dont les petites excentricités ne suscitent jamais aucun commentaire déplacé. On ressort du film avec la banane, avec l’envie de prendre tout le monde dans ses bras et de chanter de la variété. Une petite sucrerie des plus réjouissantes à ajouter à la filmographie sensible d’un réalisateur au grand cœur.
Sortie en 2014 et disponible en VOD