G.B.F. (Gay Best Friend) de Darren Stein : le gay accessoire

By Gaspard Granaud | 12 avril 2021

Un lycée typique américain. Tanner (Michael J. Willett) et Brent (Paul Iacono) sont gays et hésitent à faire leur coming out. Ils n’ont en effet aucune envie de devenir la cible des footeux hétéros et homophobes et de subir un calvaire au quotidien.

Ils sont néanmoins conscients d’une chose : les gays étant devenus « tendance », ils pourront sans doute compter sur les reines du lycée pour assurer leurs arrières. Car toute la presse féminine le dit : pour être au top de la popularité, l’accessoire par excellence c’est un meilleur ami gay ! Preuve en est : chacune des trois filles les plus en vue du bahut, Fawcett (Sasha Pieterse), Shley (Andrea Bowen) et Caprice (Xosha Roquemore) désespèrent de ne pas trouver pareil type d’ami pour se différencier. Et tout le monde semble atteint par cette mode puisque Soledad, une fille moyennement populaire souhaitant se mettre en avant, lance un club d’aide aux jeunes gays sans pouvoir accueillir de nouveaux adhérents. Bien décidée à faire marcher son groupe, elle lance avec ses copines une « chasse aux gays » en utilisant une application de drague. C’est ainsi que Tanner se fait avoir et devient dès lors « le gay du lycée ».

Alors que, comme il l’avait imaginé, quelques hétéros beaufs viennent lui chercher des noises, les trois aspirantes reines de promo volent à son secours et se battent pour devenir sa meilleure amie. Du jour au lendemain, Tanner voit alors sa côte de popularité exploser et passe du statut de garçon effacé et peu affirmé à celui de star des environs. Il se brouille dans la foulée avec Brent, qui est celui à l’avoir poussé à télécharger l’application et se venge en révélant l’homosexualité de ce dernier à sa mère, qui s’en doutait, et qui ne le lâche plus.

Sujet de toutes les conversations et les convoitises, Tanner perd peu à peu de vue ses amis de toujours, se laisse instrumentaliser par les garces populaires qui le courtisent au point d’en oublier l’essentiel : s’affirmer et tenter d’être aimé pour qui il est vraiment…

Darren Stein, réalisateur du teen movie culte Jawbreaker, (on retrouve ici Rebecca Gayheart dans un second rôle) revient à son genre de prédilection avec Gay Best Friend ou G.B.F. : le teen movie aux accents camp. Aucun cliché n’est oublié : la blonde ultra populaire et garce qui cache un cœur sous ses airs superficiels, la diva douée pour la danse, la croyante qui se révèle être une tarée du sexe, le mormon hétéro à l’homosexualité refoulée, le joli gay minet introverti et son meilleur ami complètement queer… C’est totalement voulu et de ces figures imposées, Darren Stein ne manque pas de tirer des situations souvent hilarantes. Ou l’art de détourner tous les codes du film d’ado autant que d’un certain cinéma LGBT.

Ici le jeune héros ne lutte pas pour pouvoir être gay sans être victime d’homophobie : il a juste envie d’être aimé pour ce qu’il est, de ne pas être l’équivalent d’une marque de sac à main. L’homosexualité n’est plus honteuse, elle est à la mode et rend hystérique toutes les filles qui veulent être dans le vent. La bataille entre les trois reines du lycée donne lieu à des scène réjouissantes et bitchy, les répliques délirantes abondent.

Le casting est lui essentiellement composé de stars de séries tv (se démarque largement du lot Sasha Pieterse, la garce blonde qui est bien connue des amateurs de soap puisque qu’elle jouait le rôle phare d’Alison dans la série Pretty Little Liars). La mise en scène est calibrée et colorée, l’ensemble plein d’énergie.

Une mère qui pour se rapprocher de son fils gay le force à passer avec elle une soirée dvd devant Brokeback Mountain, les filles populaires qui jouent à la poupée avec leur G.B.F. en le soumettant à des séances de relooking… Ce qui est plaisant à la vision de ce film qui n’a d’autre but que de faire rire et divertir (ce qu’il fait très bien) c’est qu’il aborde avec légèreté le thème du coming out et de l’acceptation de son homosexualité. C’est ludique et les vrais problèmes que rencontrent les jeunes gays dans ce lycée ou tout semble tourner autour de la popularité ne sont pas forcément ceux que l’on croit.

Avec humour et tendresse, Darren Stein se moque gentiment des hétéros qui veulent « être dans le coup » en prenant les gays pour des faire valoir, des accessoires, oubliant que ce sont tout simplement des personnes comme les autres, que contrairement à ce que véhiculent les médias débiles, ce n’est pas une mode, juste une question d’identité. On notera que sans cet « effet de mode » les choses pourraient encore être très difficiles : les machos homophobes existant toujours et les fanatiques aussi… On ressort de cette comédie modeste et jouissive avec le sourire.

Film produit en 2013 et disponible sur Netflix et en VOD