CINEMA
LA MAISON DU DOCTEUR EDWARDES de Alfred Hitchcock : amour, crime et psychanalyse
Constance Peterson (Ingrid Bergman) est psychanalyste dans un asile. Son directeur est sur le point d’être envoyé à la retraite et l’établissement accueille son successeur : le docteur Edwardes (Gregory Peck). Dès le premier coup d’œil, c’est le coup de foudre entre ce dernier et Constance, admirative de son travail, surprise de son jeune âge et de son charme évident.
Quelque chose semble pourtant clocher : le jeune docteur Edwardes a des réactions parfois pour le moins étranges (il est notamment pris de panique à la vision de lignes ou de rayures). Constance, amoureuse pour la première fois, refuse d’y prêter trop attention mais très vite il s’avère que le docteur Edwardes a été assassiné et que l’homme qui se fait passer pour lui, John Ballantine, pourrait être son meurtrier.
L’usurpateur confesse à Constance qu’il est probable qu’il ait commis l’irréparable, qu’il est victime d’un complexe de culpabilité et surtout qu’il est complètement amnésique. Il finit par s’enfuir, l’asile alerte les autorités. Constance, elle, décide de partir à la recherche de Ballantine et de l’aider ,via la psychanalyse, à retrouver la mémoire et ainsi déceler s’il est vraiment l’auteur du crime. Ils partent en cavale et trouvent refuge chez un ancien professeur de la psy. Le temps est compté. Constance a-t-elle raison de se fier pour la première fois à ses sentiments en aidant un hypothétique assassin ?
La maison du docteur Edwardes (Spellbound en VO) fait indéniablement partie des grandes œuvres d’Hitchcock. Sublime au niveau de la mise en scène et doté d’un duo d’acteurs principaux des plus glamours. Ingrid Bergman campe une psy qui a consacré sa vie à sa carrière, un poil rigide, intelligente mais peu avenante. Tout change quand débarque Ballantine se faisant passer pour le Docteur Edwardes. C’est peu dire qu’il n’a rien à voir avec les autres membres du personnel. Grand, beau, fort, intrigant, il s’avèrera en plus être un homme plein de fêlures, potentiellement dangereux.
Si le film tourne bel et bien autour d’une enquête sur fond de psychanalyse, l’histoire d’amour entre Constance et John Ballantine décuple l’intensité. D’abord comme une petite fille, fan hésitante, devant l’homme qu’elle désire et admire, Constance se fait plus maternelle, s’affirme, quand John Ballantine dévoile ses incertitudes, ses peurs. Contre toutes ses valeurs, son professionnalisme, la psy suit son instinct, se met en péril par amour. Et comme on la comprend : Gregory Peck est ici au summum de sa beauté, tout en ambiguïtés.
De nombreux plans rapprochés subliment le visage des deux acteurs tandis que des gros plans habiles et souvent vertigineux soulignent les malaises des protagonistes. On ressent complètement les moments de panique de Ballantine face à des détails à priori sans importance. Un regard, des rayures, une nappe, une main, suffisent à nous faire frémir. On reconnaît bien là tout le talent d’Hitchcock qui par sa mise en scène constamment inspirée transcende tout au service d’une intrigue des plus excitantes. Parmi les grands moments du métrage, impossible de ne pas citer la scène durant laquelle John Ballantine raconte un de ses rêves. Le rêve est matérialisé de façon originale et virtuose le temps de scènes signées Salvador Dali.
Puissant visuellement, parfaitement incarné, émouvant et haletant, La maison du docteur Edwardes, entre tension, sentiments et humour, est un thriller psychanalytique des plus réussis.
Film sorti en 1945 et disponible en DVD