LA TIGRESSE de Byron Haskin : transformée par l’argent

Alors qu’ils sont sur la route et se querellent légèrement, Jane Palmer (Lizabeth Scott) et son mari Alan (Arthur Kennedy), sont stupéfaits quand une voiture qui croise leur chemin balance une malle à l’arrière de leur voiture. En découvrant que la malle contient des milliers de dollars, ils sont encore plus étonnés. Après une course poursuite, ils retournent chez eux et placent plus tard l’argent sur un compte.

Les jours suivants, le couple ne semble pas sur la même longueur d’ondes quand il s’agit de choisir ce qu’ils feront avec cet argent. Alan entend le livrer à la police, pour ne pas prendre de risques et ne pas faire basculer son quotidien qui lui convient très bien. Jane, qui a toujours rêvé d’une vie plus confortable, aimerait garder le magot. Elle a d’ailleurs déjà commencé à « flamber » en s’achetant une fourrure et d’autres tenues hors de prix.

Comprenant que son mari ne compte pas profiter de l’occasion pour être riche, elle se transforme. Un soir, alors qu’ils partagent une virée romantique sur une barque comme lors de leur premier rendez-vous, Alan trouve dans le sac de sa femme un revolver. Elle le tue et prend soin de se débarrasser du corps. Définitivement prête à tout pour garder l’argent et mener la vie dont elle a toujours rêvé, celle qui s’affiche désormais comme une véritable femme fatale n’est pas au bout de ses peines.

Elle doit composer avec Danny (Dan Druyea), un faux détective et probablement le détenteur originel de la mallette qui entend bien la récupérer. Elle doit éviter les suspicions de Kathy (Kristine Miller), la soeur de son mari qui vit dans le même immeuble et qui s’inquiète de sa mystérieuse disparition. Et elle doit surtout tenter de remettre la main sur le ticket qui lui permettra de retirer l’argent à la consigne. Alors que les jours défilent et que le risque de se faire prendre s’agrandit, Jane ne va reculer devant rien pour tenter de parvenir à ses fins… 

Les amateurs de film noir et de femme fatale ne résisteront pas à La Tigresse (Too Late for tears) ! Extrêmement jouissif, le long-métrage de Byron Haskin offre un rôle en or à la démente Lizabeth Scott qui en fait des tonnes dans son rôle de garce hautement machiavélique. Coupe de cheveux toujours impeccable, séductrice et manipulatrice, elle use et abuse de sa frimousse de jolie poupée pour duper tous ceux qui se mettent en travers de son chemin. Portrait d’une femme obsédée par l’argent jusqu’à flirter avec la folie et s’abandonner au crime, l’oeuvre réserve son lot de scènes et répliques savoureuses et tient en haleine du début à la fin.

Complice des stratagèmes de plus en plus alambiqués de son héroïne bitchy et cinglée, le spectateur s’embarque dans une véritable spirale infernale. Dès lors qu’elle a assassiné son mari, Jane n’a pratiquement plus rien à perdre et  va absolument tout tenter pour assouvir sa soif d’argent. Délicieusement putassier par moments, le film étonne par la méchanceté et la cruauté qui animent la plupart des protagonistes. Les échanges entre Jane et Danny valent particulièrement le détour. Ou quand l’appât du gain fait complètement tourner la tête… Si la réalisation se contente d’une relative élégance, Lizabeth Scott dévore l’écran de par son irrésistible cabotinage. Une femme fatale « no limit » au coeur d’une intrigue ténébreuse. Culte.

Film sorti en 1949 et visible en VO ici