FICTIONS LGBT
MA VIE AVEC JAMES DEAN de Dominique Choisy : un film doux et enchanteur
Dominique Choisy nous avait charmé avec son long-métrage « Les Fraises des bois ». Il était doté d’une douce bizarrerie que l’on retrouve dans sa nouvelle fiction, « Ma vie avec James Dean ». Portrait d’un jeune réalisateur romantique et un peu perdu dans son monde, l’ensemble enchante de la première à la dernière minute. Un pur moment de cinéma et de magie.
Nous suivons le périple sur le littéral normand de Géraud (Johnny Rasse), réalisateur qui vient présenter son premier film intitulé « Ma vie avec James Dean ». Quand il était petit, James Dean était son ami imaginaire, une sorte de fantasme de liberté alors que l’homosexualité n’était pas forcément facile à porter. Invité par un cinéma et une association de cinéphiles à venir présenter son oeuvre, l’artiste se retrouve au centre d’une série de mésaventures : on lui vole son téléphone, sa projection n’est pas annoncée dans le programme, il n’y a qu’un billet vendu. Mais le hasard va amener Géraud à faire sur place des rencontres inoubliables qui ne manqueront pas de nourrir son art.
C’est un film qu’il n’est pas forcément facile de décrire, « spécial » comme celui du personnage principal qui semble à chaque fois s’en excuser avec une petite mine adorable. C’est une déclaration d’amour au cinéma, un hommage merveilleux à une certaine cinéphilie française (Nouvelle Vague, Rohmer, Tati, Demy), la peinture douce d’un réalisateur en devenir, le récit amusé d’une « tournée Province » comme les appellent les professionnels du milieu et surtout un enchaînement de rencontres réjouissantes qui donnent lieu à un chassé croisé tendre et fantaisiste.
Dominique Choisy aime ses personnages et ses acteurs et cela se ressent à chaque plan. Ils sont magnifiques, porteurs d’histoires universelles entre rires et larmes. Le « héros » un peu snob et maladroit parfois qui est partagé entre sa passion pour l’acteur de son film et les sollicitations du jeune Balthazar (Mickaël Pelissier), ouvreur de salles d’une touchante sincérité et pureté. L’exploitante (Nathalie Richard) qui s’éparpille entre son travail stimulant et sa vie personnelle très agitée. L’employée de l’hôtel (Juliette Damiens) un tantinet acariâtre qui se rêve en comédienne et récite dès qu’elle le peut « La mouette » de Tchekhov. Et puis aussi une mystérieuse spectatrice (campée par la géniale et inoubliable Françoise Lebrun – un clin d’oeil à Eustache ?), un énigmatique vagabond et tout un tas d’autres apparitions qui se déploient avec malice.
Evoquant des thèmes universels (la création, l’amour, la vie entre trébuchements et heureux hasards) , « Ma vie avec James Dean » fait l’effet d’un poème de par son petit génie (une très belle écriture pleine de drôlerie et de finesse, une maîtrise à tous les niveaux) et d’un bonbon de par sa beauté formelle (chaque plan est un régal de composition et de couleurs). Ajoutez à cela une bande-originale aux allures de caresse signée du super Bertrand Belin (qui tient un second rôle de papa franc du collier) et le sentiment de tomber amoureux de Géraud alias Johnny Rasse (une sorte de mélancolie sourde habite ce comédien brillant au phrasé et à la présence singulière et enivrante) et vous obtenez un gros coup de coeur. Un pur moment de cinéma, généreux, humain, touché par la grâce. Le bonheur sur grand écran en somme.
Sorti en salles le 23 janvier 2019 et disponible sur la plateforme de Films LGBT Queerscreen