CINEMA
NUITS BLANCHES avec un Marcello Mastroianni romantique
On ne peut pas vraiment dire que « Nuits Blanches » fasse partie des films les plus connus de Luchino Visconti mais il n’en demeure pas moins un mélodrame romantique hanté à l’immense mélancolie. Adaptation libre d’une nouvelle de Dostoievski, ce long-métrage tourné en noir et blanc à Cinecittà a ce je ne sais quoi d’irréel avec ses décors artificiels qui finissent par lui donner un charme tout particulier, magnifiquement mis en lumière.
Au coeur de la nuit, seul, Mario (Marcello Marcello Mastroianni) tombe sur une belle inconnue qu’il prend d’abord bêtement pour une prostituée. Elle s’appelle Natalia (Maria Schell), elle lui plait, il veut la revoir. Le temps de trois nuits, ils vont discuter, se raconter et Mario, en même temps qu’il va tomber amoureux de Natalia va comprendre qu’il a très peu de chances avec elle. Et pour cause : elle attend un autre.
Le temps d’un flashback, Natalia raconte comment elle a rencontré l’élu de son coeur. Un homme assez froid (Jean Marais) pour lequel elle a eu le coup de foudre. Il logeait chez elle et sa grand-mère intrusive. Alors que leur histoire commençait à peine, l’homme a dû partir pour d’obscures raisons. Depuis un an, elle attend qu’il revienne. Elle sait qu’il vient d’arriver en ville et elle espère qu’il viendra à elle. Mais elle doute…
Mario écoute les peurs et le manque de celle qu’il désire ouvertement. Il espère bien évidemment que celui qu’elle attend ne reviendra jamais pour la libérer de ce fantasme romantique qui la consume. Dévoué mais pas naïf, Mario la trahit par ailleurs alors qu’elle lui demande d’aller donner une lettre à l’objet de son affection. Il ne veut pas l’aider, il ne veut pas se sacrifier.
L’intrigue prend place dans une petite ville un peu triste de l’Italie d’après guerre où une certaine misère sociale est palpable. L’amour y apparait vénéneux à souhait. Mario comme Natalia ont en commun de s’attacher à un fantasme sentimental qui les exulte autant qu’il les détruit. Mario essaie, force encore et encore espérant « récupérer » l’affection de celle qui ne parle que d’un autre homme. Natalia s’accroche à la vision sublimée d’un homme qu’elle pense connaître mais qui dans les faits s’apparente plus à inconnu.
Deux écorchés vifs, des nuits entre rêveries et amertume, une échappée magique le temps d’une danse et une scène finale déchirante et cruelle à souhait… « Nuits Blanches » a le parfum de désespoir des amours non partagés, procure cette sensation de gueule de bois des coups de foudre que l’on n’arrive pas à matérialiser. L’amour et le désir semblent ici toujours aboutir à la désillusion (un personnage secondaire de prostituée désabusée enfonce le clou). Triste et beau.
Film sorti en France le 8 mai 1958 // Disponible en VOD
Le crush du film
Contrairement au personnage de Natalia, on jetterait plutôt notre dévolu sur le romantique Marcello Mastroianni plutôt que sur un Jean Marais qui apparait ici blasé et glacial. Marcello trouve là un nouveau personnage d’homme à vif, entre séduction et vulnérabilité. La beauté d’un homme qui pleure alors que ses rêves s’écroulent.