ONE SHOT SONG
Sébastien Delage raconte le vertige du chemsex avec « Karaokétamine »
Pour fêter la sortie de son nouvel album « Ba*se Platine » et quelques semaines après le clip torride du morceau du même titre, Sébastien Delage dévoile le clip de son nouveau single Karaokétamine. Et c’est une claque !
Côté son, Sébastien Delage nous entraine en pleine piste vaporeuse, entre indie pop et rock lubrique, le tout saupoudré d’un petit extrait du livre Pinocchio de Carlo Collodi. Il faut une fois encore saluer l’audace de l’artiste qui pour son deuxième album refuse de lisser son travail et préfère aller explorer des horizons plus indés, plus proches de lui et qui n’a pas peur d’aller s’aventurer vers les expériences musicales à une triste époque où l’industrie musicale essaie de formater la musique de tous les artistes émergents.
Le titre est top musicalement et il prend une sacrée ampleur une fois accompagné du clip réalisé par Manuel Marmier et Antoine Presles. Les paroles de la chanson évoquent le vertige du chemsex qui foudroie un bon nombre de gays et la vidéo propose de suivre un personnage, incarné par l’excellent comédien Gabriel Marc (vivement aimé ici pour sa pièce sur Jacques de Bascher), qui s’égare au coeur des nuits sous substance. Le regard est franc, direct, cru et le clip nous fait ressentir à la fois l’excitation, le tourbillon des sens et aussi le glauque et le danger.
Ce véritable trip visuel, très charnel et qui se mue petit à petit en quelque chose de démoniaque (la référence à Pinocchio et ses enfants se transformant en âne est aussi parfaite que glaçante), retranscrit parfaitement la solitude intime qui peut gagner beaucoup de gays de 20, 30 ou 40 ans, cherchant à fuir la réalité, la timidité, les blocages, en prenant un ticket express pour les expériences artificielles. Avec brio, Gabriel Marc se donne à fond pour interpréter son personnage de mec rangé qui travaille en costard et qui la nuit tombée scrute de manière compulsive Grindr ou se perd dans des cruising bars où des rencontres aussi magnétiques que vénéneuses peuvent survenir. Il suffit d’être un peu faible et influençable, un peu auto-destructeur aussi et la machine est lancée. Aspiré par la nuit, la fête, assoiffé de plaisir, le garçon de Karaokétamine s’oublie jusqu’aux extrêmes, comprenant à un moment que le ticket du plaisir qu’il a pris pourrait être sans retour… Mais cela suffira-t-il à l’empêcher de recommencer ?
Réaliste, très juste, ce clip qui a tout du petit court-métrage (la mise en scène et l’interprétation sont au top, la photographie aussi) est à voir absolument et devrait sans mal se faire une place dans bon nombre de Festivals de Films LGBT (il a obtenu le soutien du CNC). Comme c’était le cas pour le single Ba*se Platine, il vous faudra avoir un compte (gratuit) Vimeo pour le visionner en ligne car le contenu a été jugé comme étant adulte et en raison de son caractère non censuré ne sera pas disponible sur Youtube. On ne peut qu’encourager à faire ce petit effort de 2 minutes pour se créer un compte tant Sébastien Delage et son équipe ont mis toute leur passion dans ce projet intense.