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Skins, saison 4 (2010) : excès et sensibilité
Nouvelle fournée d’épisodes pour les ados anglais délurés de Skins. Nous retrouvons non sans plaisir Effy, Cook, Freddie, JJ, Naomi et les autres pour une saison plus dramatique que les autres. La saison 4 commence en force avec une scène furieuse en boite de nuit durant laquelle une adolescente sous coke se suicide en se jetant dans le vide. Une fois de plus, les scénaristes sonderont le malaise teen avec ce mélange curieux et précieux de trash et de délicatesse. Frustration : la saison ne comporte que 8 épisodes. C’est peu et sachant qu’il s’agit des dernières aventures des protagonistes (les saisons 5 et 6 seront axées sur un tout nouveau casting), on est un peu tristes de ne pas passer plus de temps avec eux, on a parfois l’impression qu’il y avait encore beaucoup à dire sur certains…
Comme toujours, chaque épisode est centré sur un personnage particulier. Ce qui génère encore des inégalités : les destins de certains étant traités mieux que d’autres. Le triangle entre Effy, Freddie et Cook peine un peu à passionner. Ce dernier se révèlera au fil de la saison comme un personnage central, une icône, le reflet d’une jeunesse en totale errance, mélange de brutalité et de sensibilité. Le défaut des épisodes centrés sur Effy et Freddie tiennent à une psychologie de comptoir, à des éléments surdramatisés, la tentation de céder à un certain sensationnalisme. La belle et rebelle Effy va ainsi sombrer dans la folie. Certes, il est toujours intéressant de traiter de la folie adolescente, d’explorer des sujets borderline. Mais ici tout parait souvent un peu lourd, voire hors de propos. Et ce qui attend le personnage de Freddie en fin de saison est à la fois surprenant et décevant. Je pense que j’aurais préféré que le show reste dans quelque chose de plus sobre, réaliste.
Malgré quelques orientations scénaristiques discutables, ces nouveaux épisodes restent souvent touchés par la grâce. Skins reste selon moi la série adolescente la mieux réalisée, proposant des univers très variés avec des bandes originales collant à chaque personnage. C’est un divertissement très soigné, tour à tour drôle, sensible, fou, décalé et tragique. On y trouve de fabuleuses intrigues comme celle entre les deux ados lesbiennes : Emily et Naomi. Alors qu’elles s’affirment enfin, elles vont découvrir les afres du couple, se faire beaucoup de mal, s’éloigner l’une de l’autre, sombrer dans une certaine déchéance. Une très belle histoire d’amour, intense et touchante. Bonheur aussi que de retrouver un épisode centré sur JJ, le personnage le plus fantaisiste. Un ado-enfant, paumé, à la folie douce et craquante. L’épisode qui le met en scène est un régal d’humour et de poésie décalée. Ou comment notre ami va se retrouver en beau père potentiel alors qu’il est déjà incapable de se gérer lui-même.
Avec Skins, on a la sensation à chaque épisode d’assister à un long-métrage qui se suffirait presque. On ne peut pas être fan de toute la collection mais il reste toujours un regard assez unique, fait d’audace et de fragilité. Si les thèmes sentimentaux abordés ne sont pas forcément originaux sur le papier, la fantaisie se retrouve par des détails, des images, des couleurs, un casting parfaitement élaboré. Je ne me vois pas considérer Skins comme un soap ou une sucrerie. Cette série reste pour moi une œuvre à part entière, certes inégale mais toujours très riche et surprenante. J’aurais aimé suivre encore ces personnages le temps d’une saison, le final me semblant un peu bâclé, frustrant. Mais j’ai en même temps hâte de découvrir les nouvelles têtes de la saison 5 et de voir comment les scénaristes vont se renouveler. A suivre.