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Watine, Still Grounds for Love : la force du grand écart
Une fois n’est pas coutume, revenons sur un album paru en 2011. Belle découverte tardive que l’univers de Watine, artiste française au parcours tout sauf balisé. Une formation classique, une incursion dans le monde électro, du trip hop, et puis en 2011 l’album Still Grounds for Love, pépite indépendante aux tonalités pop et rock. Avec Watine, la musique est changeante, pleine de contrastes et de visages surprenants. C’est la musique des grands écarts et des opposés qui s’attirent : des paroles dont la pureté se heurte à une certaine noirceur, des titres que l’on serait tenté de décrire comme « intimistes » alors qu’ils disposent d’arrangements très riches et soignés, la sensibilité d’une enfant qui semble pourtant déjà bien armée pour les mésaventures de la vie.
Il émane des pistes de Still Grounds for Love une très forte mélancolie et en même temps quelque chose de très doux, une sorte de souffle de vie. Un enivrant entre-deux duquel on s’échappe par moments pour tomber, pleurer, puis soudain se relever. C’est un disque qui creuse et qui réconforte, plein de petits secrets. On ignore la formule magique de Watine pour nous secouer ainsi de l’intérieur comme par exemple sur le titre d’introduction The story of that girl. Cela semble linéaire, presque ordinaire, mais il y a des notes, des accords, une façon de jouer avec la voix qui font que l’on en ressort chamboulé, avec l’envie de réécouter ce qui vient de se déployer encore et encore. Des cordes obsédantes, qui font vaciller (comme sur le poignant The strings of my fate), une voix classieuse et insaisissable… : on écoute ce disque avec la même attention que l’on porterait à quelqu’un de cher qui nous ouvrirait son cœur. La sincérité émouvante d’un titre comme Trying to cède place au ludique et enchanteur (mais pas moins contrasté) Books and Lovers. Si l’anglais (et sa musicalité naturelle) permet à l’artiste de se livrer dans des pièces ambivalentes, le français fait son apparition le temps de l’élégante ballade Le cours de ma vie. Le prochain album de Watine, ATALAYE, devrait d’ailleurs être intégralement dans notre langue. L’occasion sans aucun doute pour elle de nous surprendre à nouveau. En attendant, on ne saurait trop vous conseiller de vous plonger dans ses aventures intemporelles et cinématographiques, accompagnées de clips du meilleur goût. Page Bandcamp.
(Watine a également sorti fin 2013 un autre album ,en collaboration avec Paul Levis, autour de poèmes d’Emily Dickinson : This Quiet Dust)