YELLOWJACKETS saison 1 : la forêt et les démons

By Gaspard Granaud | 27 avril 2022

Série phénomène surprise de 2022, Yellowjackets se dévoile dans une première saison haletante, intrigante et flippante à la fois. Portée par des actrices au top, ce mélange de drame, thriller et soap avec une pointe d’horreur est parti pour durer quelques saisons. 

L’histoire nous propulse dans les années 1990 où l’on suit le quotidien d’une bande de filles faisant partie d’un club de foot féminin, les Yellowjackets. L’équipe est sur le point de participer aux JO et un voyage en avion se profile. Avant le départ, on découvre que Jackie (Ella Purnell), la jolie fille populaire de la bande, pense à donner sa virginité à son copain Jeff. Ce qu’elle ignore c’est que Jeff la trompe et a déjà des relations sexuelles avec… sa meilleure amie Shauna (Sophie Nélisse). Ces histoires ordinaires d’adolescentes vont être reléguées au second plan rapidement… En effet le jour du vol en avion tout part en vrille. L’avion se crashe dans une forêt loin de tout. Les morts sont nombreux, quasiment tous les adultes accompagnants périssent à l’exception du coach, Ben Scott (Steven Krueger). Ce dernier n’est qui plus est pas en bonne forme, amputé d’une jambe à cause de l’accident. Ben est le seul adulte et l’un des seuls hommes à se retrouver coincé dans la forêt en compagnie d’un groupe d’adolescentes. Les autres garçons sont l’adolescent sexy Travis (Kevin Alves) et son petit frère. 

Si la panique règne logiquement, la survie s’organise instantanément. L’étrange et survoltée Misty (Samantha Hanratty), habituellement paria à l’école, se démarque par ses nombreuses initiatives. Celle qui a toujours été rejetée se sent enfin utile et mise en lumière. Ce qui l’amène paradoxalement à jubiler dans ce contexte pourtant on ne peut plus glauque. Dans le pilote, on la voit détruire l’enregistreur de vol de l’avion qu’elle retrouve par hasard dans la forêt… 

Si tout le monde espère que les secours ne finiront pas par tarder, les jours vont passer, amenuisant progressivement les espoirs et poussant le groupe à devoir réfléchir aux différents moyens de survivre. 

La série s’articule autour de deux temporalités : le moment du drame du crash d’avion et l’évolution de la survie des Yellowjackets dans une forêt possiblement hostile et le quotidien de quelques survivantes devenues adultes dans la société d’aujourd’hui. Nous retrouvons alors : Shauna (Melanie Lynskey) qui est devenue maman et qui est mariée à Jeff, l’ancien copain de sa meilleure amie Jackie dont on se demande si elle a survécu / Taissa (Tawny Cypress) qui ado semblait faire figure de leader avec un tempérament bien trempé. Une lesbienne affirmée et charismatique. Adulte, elle se prépare à entrer dans une campagne politique intense tout en essayant d’être présente pour sa compagne et leur petit garçon qui a l’air un poil perturbé / Natalie (Juliette Lewis), ancienne ado rebelle qui est devenue une alcoolique tentant de s’en sortir après plusieurs cures de desintox. Une femme brisée et à vif très attachée encore à Travis dont elle est visiblement tombée amoureuse dans la forêt / Misty qui apparait comme une infirmière foldingue un peu sociopathe sur les bords. 

Les 4 femmes ont tenté avec plus ou moins de succès de reprendre une vie banale et ont fait de leur expérience traumatisante dans la forêt un secret. On apprend qu’elles seraient restées 19 mois sur place, que pas mal des Yellowjackets n’ont pas pu survivre. Sur le web, certains se demandent comment elles ont pu tenir et des théories sur le fait qu’elles se seraient livrées au cannibalisme circulent… 

Que s’est-il réellement passé dans la forêt ? C’est le grand mystère de la série auquel se joint un nouveau suspense alors que devenues adultes les anciennes Yellowjackets reçoivent des messages anonymes énigmatiques leur faisant du chantage et leur renvoyant à l’épisode le plus traumatique de leur vie. 

Les actrices adolescentes comme adultes sont parfaites et la série déploie une galerie de personnages féminins instantanément attachants et forts. Le show joue sur une certaine nostalgie des années 1990 (avec la bande-originale qui va avec) mais surtout s’amuse à brouiller les pistes. Tout ce premier chapitre baigne dans une atmosphère poisseuse renforcée par une mise en scène très efficace, joliment stylisée et qui transpire l’amour du cinéma de genre et du gore. En effet, Yellowjackets n’a pas peur de montrer des images difficiles, sanglantes, dérangeantes, qui donnent la nausée : on tourne fréquemment la tête !

L’ensemble a ce petit parfum un peu malsain et morbide qui fait que de nombreuses images et séquences perturbent et hantent. 

On pense logiquement, crash d’avion et mystère étant au rendez-vous, à la série culte Lost. A l’instar de celle-ci, Yellowjackets s’amuse à amener une potentielle part de fantastique voire d’ésotérisme. Côté références saute également assez vite aux yeux la filiation avec Sa majesté des mouches. Enfin, plus surprenant : il y a un côté plus plaisir coupable et soap opera à la Pretty Little Liars. Pour ce qui est de l’aspect plus cinéma on citera spontanément Midsommar. 

Secouez tout ça dans un shaker et vous obtenez une première saison très bien huilée, jamais lassante, stimulante et souvent perturbante. Il y a beaucoup de noirceur et de zones d’ombres. Petit à petit, on comprend que personne n’est ressorti indemne de cette sombre histoire et que tous les protagonistes ont de grosses parts d’ombre voire sont franchement dérangés. La forêt, l’isolement et la privation ont fait ressortir ce qu’il y avait de plus primitif voire démoniaque chez chacune.

Reste à voir comment s’articulera la suite, plusieurs saisons étant déjà à prévoir. La curiosité est de mise ainsi que la hâte de retrouver ce cast de folie (mentions spéciales à Christina Ricci et Juliette Lewis, absolument démentes). 

Série sortie en 2022 et visible en France sur Mycanal