FICTIONS LGBT
« Eastsiders » saison 3 : le couple sans filet
Troisième saison financée grâce à l’aide de ses fans, la série « Eastsiders » continue de sonder de façon frontale le couple. Pour ce nouveau chapitre, l’agencement de la série évolue. Alors qu’auparavant les différents segments se superposaient, ici chaque épisode se concentre totalement sur l’un des trois couples phares. Avec 4 épisodes sur 6 dédiés au couple gay formé par Cal (Kit Williamson) et Tom (Van Hansis).
Ces derniers constituent la pierre angulaire du show. La saison 1 les montrait en pleine implosion, la seconde marquait leurs retrouvailles. Cette fois, les deux garçons s’embarquent pour un road trip. A priori l’occasion de souffler mais incapables de ne pas cogiter, ils font sur la route le point sur leur vie. Tom a peur de ne jamais arriver à devenir l’écrivain qu’il a toujours rêvé d’être, Cal réalise à quel point il est encore un ado attardé à l’approche de la quarantaine (sa mère continue de lui payer son loyer). L’épanouissement professionnel n’est pas vraiment au rendez-vous et l’équilibre personnel fragile.
Conscients de leurs problèmes avec la fidélité, Cal et Thom ont opté pour une sexualité ouverte à travers laquelle ils s’autorisent plans à 3 et échappées avec des garçons de passage. Cela n’est pas sans risque ni pour leur santé (les IST continuent de circuler même s’ils prennent la PrEp) ni pour leur relation (un plan peut souvent dégénérer et créer de la jalousie). En plein voyage, Thom se laisse approcher par un très sexy vagabond (campé par Colby Keller) mais le trio qui se met en place ne sera pas vraiment sans conséquences.
Ce qui émane de ce couple regardé avec beaucoup de tendresse mais auquel rien n’est épargné, c’est la peur. Celle de ne pas être à la hauteur, celle de la faiblesse qui peut pousser sur un coup de colère à faire n’importe quoi. Les deux garçons ont connu la rupture, cernent très bien leurs défauts, ils ont envie de rester ensemble le plus longtemps possible mais à l’heure des applications et d’une ère où chacun cherche toujours plus et mieux, on n’est jamais tranquille.
En parallèle de ce segment gay, l’histoire de Quincy (Stephen Guarino) et Douglas (William Belli). Deux drag queens amoureuses qui ont aussi entamé un road trip. Quincy aimerait demander en mariage son partenaire mais ce dernier étant toujours dans la représentation de lui-même, pas facile de savoir s’il dira oui. Là aussi, le couple n’est pas totalement au beau fixe. Douglas est fatigué de ne se produire que dans des petits bars perdus et de ne pas percer et Quincy peine à assurer dans son rôle de manager. L’envie de baisser les bras est souvent là mais ils s’accrochent.
Enfin il y a le couple hétéro formé par Ian (John Halbach) et Hillary (Brianna Brown), la soeur de Cal. Ils entretiennent une vie « healthy » et calme et Ian tente de suivre les multiples fantaisies de celle dont il partage le quotidien. Désireuse d’avoir plus d’espace, cette dernière l’encourage à aller se balader une ou deux heures seul chaque jour. C’est que Ian est un peu collant. Etant le genre de mec à se concentrer totalement sur son couple, il se retrouve à ne vraiment pas savoir quoi faire et réalise qu’il n’a en fait pas vraiment d’amis. Il va recroiser son ex Kathy (géniale Constance Wu) et elle va devenir sa camarade de marche. L’occasion pour eux de cicatriser leur rupture passée, leurs anciennes rancoeurs mais aussi de faire ressurgir un petit désir.
Ce qui est très beau dans cette série indépendante, c’est sa façon de ne jamais ménager ses protagonistes, de ne pas montrer le couple comme un stéréotype de comédie romantique. On voit tous les coulisses derrière les sourires, tous les travers de l’intimité. Ce que « Eastsiders » nous dit, c’est que l’amour c’est difficile, que c’est un combat de tous les jours. Il y a tant de fois où l’on a envie d’abandonner, des tas de moments où notre partenaire peut nous agacer ou nous déplaire. Mais elle nous dit aussi que cela vaut le coup de batailler, que c’est beau malgré tout.
L’écriture est fine, inspirée et référencée, la mise en scène a toujours ce côté « lo-fi » séduisant et les personnages, tout en nuances, sont très attachants. Un nouveau cru qui tient la route, donne à réfléchir et apaise après avoir appuyé là où ça peut faire mal.
Disponible sur Netflix France