FICTIONS LGBT
MASCARPONE 2 – THE RAINBOW CAKE (Maschile Plurale) : nostalgie
Sorti de nulle part, le film Mascarpone s’était imposé comme une merveilleuse surprise, populaire, généreuse et sexy en diable. L’enthousiasme autour du film fût tel que nous avons aujourd’hui droit à une suite : Mascarpone 2 – The Rainbow cake (Maschile Plurale en VO). Entre l’immense joie de retrouver les personnages et la peur d’être déçu, on fait le bilan.
L’action se situe trois ans après la fin du premier film qui marquait un nouveau départ pour le ravissant et attachant Antonio (Giancario Commare) : il apprenait enfin, après toute une vie à se reposer sur les autres et à exister à travers l’amour, à avancer seul.
Nous le retrouvons avec une carrière florissante de pâtissier / influenceur. Antonio a su utiliser ses talents et sa bonne bouille pour devenir une petite star d’Internet, se perfectionner dans la pâtisserie et monter un bon business. Créateur de contenu et détenteur d’une pâtisserie à la mode, il n’a pas à se plaindre. Et pourtant, sa mine blasée et un peu tristounette laisse deviner qu’il n’est pas tout à fait heureux et que quelque chose lui manque.
Son ascension ne s’est pas faite sans sacrifices et on apprend qu’Antonio a perdu le contact avec son ancien mentor, ami et amant Luca (le toujours hyper sexy Gianmarco Saurino). Il a ressenti à un moment le besoin d’avancer seul, au risque de blesser profondément Luca en stoppant toute communication avec lui.
Alors qu’il traverse une période où il est en pleine quête de sens et alors qu’on lui reproche de ne plus rien créer de nouveau en pâtisserie, Antonio se sent un peu nostalgique. Et voilà que d’un coup débarque dans sa pâtisserie Luca ! Après une période sombre qui l’a amené à fermer la pâtisserie où lui, Antonio et leur défunt ami Denis, avaient vécu des moments inoubliables, Luca s’est reconverti en éducateur dans un centre pour jeunes LGBT en difficulté.
Antonio et Luca se reconnectent et la nostalgie submerge définitivement Antonio qui propose à son bel ami de rouvrir ensemble sa pâtisserie. Et bien qu’il fréquente depuis quelques temps un mec tout à fait charmant, Dario (Giulio Corso), Antonio se dit que le retour de Luca dans sa vie est un signe du destin et qu’ils sont peut-être faits pour être ensemble. Il y a malheureusement une ombre au tableau. Luca est désormais en couple et amoureux d’un garçon avec qui il travaille dans son centre : Tancredi (Andrea Fuorto). Mais Antonio est bien déterminé à rallumer la flamme du passé et ne va pas manquer d’idées…
On retrouve comme réalisateur aux manettes de ce nouveau film Alessandro Guida qui était co-réalisateur du premier Mascarpone. Et c’est la garantie pour les fans de la première heure de vraiment replonger dans l’univers qui leur avait plu. On retrouve la même mise en scène colorée, les personnages sont très fidèles à eux-mêmes et le ton doux-amer qui avait fait le charme du premier épisode est lui aussi bien présent. Le charme italien opère toujours.
Pour autant, Mascarpone 2 va prendre ses distances avec son prédécesseur et emprunter un tout autre chemin. Les protagonistes ont un peu vieilli et si sur le papier seulement 3 années se sont écoulées, on a l’impression que beaucoup de choses ont changé et que l’insouciance et la légèreté ont laissé place aux fêlures et aux paradis perdus. Ce film-ci est beaucoup plus mélancolique, intériorisé, et se révèle assez avare en scènes sexy (qui constituaient l’un des gros atouts du premier Mascarpone). La tension sexuelle reste de mise entre Antonio et Luca mais l’ensemble est au final assez chaste : la période des découvertes et l’excitation qui peut aller avec semble révolue.
Le scénario, notamment dans sa deuxième partie, fait le choix (un peu comme c’était le cas avec le premier opus) de ne pas aller dans le sens de ce que voudrait voir le public pour tisser un récit réaliste et réflexif. C’est un choix qui pourra en décevoir certains (surtout que l’intrigue joue beaucoup avec nos fantasmes romantiques) mais qui se défend totalement. Là où dans le premier film Mascarpone stoppait par surprise son canevas classique de comédie romantique pour devenir un film inspirant sur le fait d’exister par soi-même, celui-ci est une réflexion mature sur le rapport au passé et aux souvenirs.
Qui n’a jamais connu ça ? Parfois, quand on a le moral dans les chaussettes, on se replonge dans le passé, on se dit que c’était mieux avant, on regrette les relations qui se sont mal terminées et on peut être tenté de les raviver. Mais le temps passe, les gens changent, de nouvelles personnes entrent en jeu et ce que l’on cherche à retrouver pourrait tout simplement ne plus exister. Si on peut faire du neuf et du bon avec du vieux en pâtisserie , peut-on en faire autant dans la vie ? Peut-être à condition d’accepter que la forme soit changée…
On ne s’y attendait pas mais il y a quelque chose d’assez dévastateur (sans s’appuyer sur de grands drames pour autant) dans ce nouveau chapitre qui montre ses personnages plus vulnérables et ambigus . Là où Mascarpone était un délicieux dessert sucré, ce Mascarpone 2 aura besoin d’un peu plus de temps pour être digéré, en acceptant que parfois les choses ne se passent pas comme on le veut mais que ce n’est pas pour autant qu’elles sont moins belles.
Film produit en 2024 et présenté au Festival Chéries Chéris 2024