FICTIONS LGBT
LOLA VERS LA MER de Laurent Micheli : une route pour se comprendre
Second long-métrage du réalisateur Laurent Micheli, Lola vers la mer suit le parcours d’une jeune femme trans qui en attendant de pouvoir poursuivre sa transition doit se confronter à un père pas facile facile incarné par Benoît Magimel. Une oeuvre apte à parler au plus grand nombre sur le sujet de la transidentité.
Lola (Mya Bollaers) ne va pas bien : sa mère vient de décéder. Alors qu’elle se rend à l’enterrement, elle découvre qu’elle arrive trop tard : son père (Benoît Magimel) a fait en sorte de l’écarter de la cérémonie. Une humiliation de plus en provenance de ce père absent qui l’a mise à la rue quand elle a fait son coming out trans.
Furieuse et blessée, Lola parvient à dérober les cendres de sa mère que le paternel ne tarde pas à venir récupérer. Ce que ce dernier ignore, c’est que sa femme, qui avait tourné le dos à Lola pendant un moment, s’était rapprochée d’elle avant sa mort et souhaitait l’accompagner dans sa grande opération. Une opération qui se voit peut-être compromise étant donné que la maman n’est plus là pour apporter le soutien financier dont la jeune femme a besoin (elle n’a pas d’argent et vit dans un foyer).
Alors que le père et la fille se confrontent pour garder les cendres, ils entament un voyage vers la mer – le lieu où la mère de Lola souhaitait visiblement que ses cendres soit dispersées. Un rapprochement est-il possible ?
Laurent Micheli montre ici la violence des mots et des réactions d’un père transphobe qui n’épargne clairement pas sa fille. Il la considère comme une aberration, une honte, se plait à la dénigrer, à s’adresser à elle en employant des termes masculins. Face à ces attaques difficiles, Lola tient tête, s’affirme. Cette relation électrique va être amenée à se transformer par petites touches le temps d’un road trip où l’attachement mutuel porté à la mère / épouse va faire ressurgir des souvenirs plus doux et une part d’humanité chez un père pourtant vraiment pas tendre.
Les préjugés les plus communs sortent de la bouche du personnage de Benoît Magimel et c’est l’occasion de pointer leur violence et leur bêtise. Cet homme transphobe apparaît surtout comme un ignorant, un homme « à l’ancienne » qui ne peut accepter les émotions et la volonté de son enfant. Si la violence est bien là, par les mots, le réalisateur choisit d’opter pour une mise en scène douce et insuffle à l’ensemble un caractère étonnamment solaire. Ainsi, Lola vers la mer agit peu à peu comme une caresse même si l’on comprend bien que le chemin vers l’acceptation s’annonce très long.
On est avant tout ici face à un film qui vaut majoritairement pour son sujet, abordé avec douceur et porté par la belle interprétation sensible de Mya Bollaers. Il n’y a pas forcément beaucoup de cinéma (c’est joli mais un peu appuyé) et la subtilité n’est pas systématiquement au rendez-vous (pas mal de clichés, de scènes aux allures de passage obligé, un scénario assez attendu). Ces faiblesses / maladresses pourront être des qualités pour un public moins cinéphile qu’il reste important de sensibiliser. Et plus largement, Lola vers la mer séduit par son humanisme, un rapport père-fille complexe qui au-delà des mots et des jugements cache de véritables couches d’amour.
Film présenté au Festival Chéries Chéris 2019 // Sortie en salles le 11 décembre 2019