CINEMA
SONG TO SONG de Terrence Malick : questions d’amour
Un casting ultra glamour au service d’un film libre et expérimental qui sublime l’amour : c’est le menu de « Song to Song » de Terrence Malick. Le réalisateur poursuit sa phase d’expérimentations avec ce poème visuel à la mise en scène époustouflante. Ceux qui détestent son cinéma, ses artifices, son filmage aérien et ses voix off introspectives peuvent passer leur chemin. Les aficionados , eux, se prendront une grosse claque de cinéma.
« Song to Song » est en quelque sorte un film miroir à « Knight of Cups ». Le personnage principal ère dans un monde luxueux et sexy jusqu’au vertige, encerclé de beauté mais incapable d’accepter pleinement le bonheur. Sauf que cette fois ce personnage principal est une femme, Faye, magnifiquement interprétée par Rooney Mara. Portrait d’une jeune artiste qui évolue comme elle peut sur la scène musicale d’Austin et surtout portrait d’une amoureuse tiraillée entre un amour évident qu’elle rêverait absolu avec un beau musicien sensible et romantique, BV (Ryan Gosling, à tomber à la renverse encore une fois) et une relation perverse avec un producteur malicieux et blasé, Cook (Michael Fassbender).
Faye aimerait choisir BV mais ses penchants autodestructeurs la poussent régulièrement dans les bras et les draps du dominant Cook. Elle ne peut s’empêcher de s’infliger la douleur et la culpabilité, s’embourbe dans des secrets, pense ne pas pouvoir aimer comme il le faudrait ou mériter le si doux et prévenant BV.
Quête de soi, quête de sens dans l’existence, quête de l’Amour : Terrence Malick ,avec la force, le souffle particulier et la poésie qu’on lui connait, parvient à matérialiser à l’écran les sentiments et sensations les plus intimes avec une profondeur qui se ressent physiquement. Le texte de la voix off est limpide, universel, souvent bouleversant.
Petit à petit, différents couples se dessinent, se croisent, dans une ronde sensuelle et désenchantée. Faye trompe BV avec Cook, s’échappe de lui et s’offre une parenthèse entre filles // BV essaie de se reconstruire dans les bras de la plus âgée Amanda (Cate Blanchett) // Cook a dans son placard le cadavre amoureux d’une belle serveuse qu’il a consumé jusqu’au dernier souffle (Natalie Portman). On reste encore et toujours pantois devant la maîtrise et le jusqu’au-boutisme de Malick, le parfum total de liberté et d’enchantement de son art. C’est toujours un peu sur le fil, entre cliché publicitaire et grâce absolue, quelque part entre le grand cinéma, le clip et le film de mode.
« Song to Song » n’est peut-être pas parfait mais il ne cesse jamais d’hypnotiser, d’attraper, d’emporter. Un rêve au goût amer dans lequel on navigue comme un fantôme, le coeur qui bat fort. Une expérience de cinéma qui n’a pas peur des prises de risque pour se rapprocher de la vérité insaisissable des sentiments humains et sentimentaux. Avec en plus en décor un festival de musique et une BO de folie : une très grande pièce de la filmographie d’un génie.
Film sorti le 12 juillet 2017